lundi 30 novembre 2015

Une maison, de la peinture, de la magie...

Souvenirs de mon ancien village des Pyrénées...
J'aurais dû faire ce billet depuis longtemps, mais c'est en voyant la maison aux milles couleurs sur POSITIVR que le déclic s'est fait...

Je suis passée des dizaines de fois devant cette maison, incapable d'aborder ses occupants...
Ce n'est malheureusement que quelques mois avant notre déménagement en Charente que j'ai enfin rencontrés les propriétaires de cette cabane aux peintures...
Une cabane enchantée...

Merci à ma maman de m'avoir aidée à entrer dans ce havre de bois et de douceur ♥

La maison enchantée





































Et même à l'intérieur...

Avec flash
Sans flash





La maison aux milles couleurs...
























mercredi 28 octobre 2015

30 ans de honte, 3 décennies gâchées à chercher à plaire à tout prix... Et...


Je l'ai déjà écris, il me semble, mais toute ma vie j'ai été angoissée et dépressive. J'en avais honte, parce que je voyais bien autour de moi que les autres n'étaient pas comme moi. Ils n'avaient pas peur d'agir, ils avaient l'air de savoir ce qu'il voulaient, ils avaient l'air d'avoir une vie.

Moi j'avançais dans le temps parce que le temps passe. J'avais peur de presque tout, sauf quand ma sœur était près de moi. J'avais peur de ma mère (que j'aime très fort), parce que je voulais lui plaire, mais qu'elle était si imprévisible dans sa façon d'être qu'elle me terrorisait. Je ne savais pas ce que je voulais, sinon être aimée, ne pas être rejetée, exclue, repoussée. Je préférais me mettre moi-même à l'écart plutôt que d'avoir à vivre cette honte.
Je croyais que ma peur et ma honte faisaient partie de moi, qu'elles me définissaient.

J'avais tors, bien sûr. Mais celui qui n'a jamais été comme ça aura beaucoup de mal à comprendre. La phobie sociale anxiété généralisée sévère est un mal qui empoisonne tout le quotidien. On a peur de ce qui arrive, de ce qui pourrait arriver, de ce que les gens pensent et même de ce que l'on pense soi même...
Les troubles anxieux généralisés et les troubles d'anxiété sociale sont donc de vrais handicaps à ne pas prendre à la légère, tout comme la phobie scolaire.

J'ai toujours eu peur de l'école, même si j'ai toujours aimé apprendre.
Peur d'abord parce que c'est une situation sociale pleine d’interactions indésirables. Les enfants sont durs entre eux. J'étais plus fragile, plus sensible que la plupart des autres enfants, alors c'était très dur. Les récréations, c'était le bagne. Au moindre rejet, je me repliais sur moi même et n'essayais plus de me confronter à la situation qui m'avais exposée à l'humiliation du rejet, signe que "je ne valais rien".
Peur de l'école ensuite parce que j'avais besoin de comprendre tout, tout de suite. Pas par orgueil, mais parce que dès qu'un blocage apparaissait, les tourments me prenaient à la gorge et je devenais obsédée par l'idée de ne pas "y arriver", par la certitude même que je n'y arriverais pas, la conviction que j'étais trop nulle...
Souvent je finissais par passer l'éponge et abandonner les exercices en chemin, parce que la peur de commettre des fautes était plus imposante que la peur de me tromper, de ne pas avoir compris la leçon. Inimaginable pour moi de devoir (et même pouvoir) l'avouer à mes professeurs. J'abandonnais, purement et simplement, avec une sorte de fatalisme désarmant.

La honte était partout dans ma vie. La peur des autres m'empêchait de lier des liens trop solides avec les autres. Je les fuyais, de toute façon. J'étais seule et solitaire... mais je haïssais ma solitude.

J'étais torturée par le sentiment de ne pas être "conforme" à la société, aux attentes (supposées, souvent imaginaires) de mes parents.
Pourtant, j'étais très vive d'esprit et je m'intéressais à tout.
J'étais ainsi précoce à bien des points et c'était le cas aussi de la sexualité.
Là aussi, je vivais ça avec une honte démesurée. J'ai eu le sentiment d'être "obsédée sexuelle" avant même d'être prépubère... et le sentiment aussi d'être anormale parce que je ne me sentais ni hétérosexuelle ni homosexuelle, et ça, ça me perturbait énormément. J'en faisais même le bouc-émissaire de tous mes maux.
Je me trompais d’ennemi, bien entendu.
Comme quand je rendais ma mère "coupable" de mon mal être, à cause de son instabilité récurrente, des incohérences dans ses paroles de parent et ses actes d'adulte (ne pas parler sèchement aux autres, alors qu'elle faisait le contraire, respecter l'intimité et la pudeur des autres, alors qu'elle rentrait dans ma chambre sans prévenir ou me regardait sous la douche à l'improviste...). Ma maman n'avait pas conscience qu'elle m'infligeait des tortures quotidiennes, et je ne disais d'ailleurs jamais rien, sauf sous le coup de la colère, quand ça devenait trop oppressant.

Paillasson et hérisson.

J'ai grandis comme ça, tant mal que bien.
J'ai passée la primaire, le collège, le lycée... toujours un peu plus en retrait, toujours dans la crainte croissante des autres, avec de nombreuses décompensations en chemin, jamais vraiment prises en compte. J'ai subi une large palette de troubles psychosomatiques, allant des algies fonctionnelles des membres inférieurs (douleurs insupportables dans les jambes, au point de ne pas tenir debout... sans "causes médicales") aux diarrhées fonctionnelles récurrentes, en passant par des angines ou des cystites de crispation...
Aujourd'hui encore mon ventre me persécute.

J'ai grandis, j'ai pris de l'âge, une partie de moi a évolué... mais une autre n'a pas mûrit. À bien des points de vue, je suis restée une enfant. Sensible, crédule, ayant besoin de se me sentir protégée par les autres, les "adultes".
Ainsi, à 33 ans je ne me sens toujours pas adulte.

Je l'étais encore moins à 19, quand j'ai rencontré Alain, ni même à 23, quand je suis allée vivre avec lui.

Malheureusement mon absence pathologique de confiance en moi me place en situation de grande vulnérabilité.

Quand j'apprécie quelqu'un, simplement parce qu'il sait me faire me sentir bien, en valorisant certains aspects de ma personne, de mes capacités ou autres, je deviens très manipulable. Ayant alors un fort sentiment de reconnaissance, je me sens même redevable à certains égards...
Aucun signal d'alarme "danger" ne s'allume dans mon cerveau, et je plonge tête baissée dans les embrouilles !

J'ai été si loin dans cette "reconnaissance mal placée".

Si loin que, malgré toute l'affection que j'ai pour Alain, dont j'ai souvent parlé sur ce blog, durant les dix années où j'ai vécu avec lui, j'ai nié ce qui aurait sauté aux yeux de qui que ce soit... c'est à dire un dysfonctionnement total du couple, flirtant (voire, étant carrément) de la violence psychologique. Bref, une violence conjugale "proprette" (pas de coups, peu de cris), réelle et trop peu médiatisée.

Pourtant elle est reconnue comme telle... D'où des campagnes de sensibilisation qui, malheureusement, passent trop souvent inaperçues...
http://www.tekiano.com
"La violence conjugale est, dans une relation privée ou privilégiée, une atteinte volontaire à l’intégrité de l’autre, une emprise, un conditionnement dont il est difficile de sortir lorsqu’on en est une des victimes." Source : www.solidaritefemmes.org

Je me suis très longtemps masquée la face en me focalisant sur l'aspect "volontaire", trouvant des explications (mais pas des "excuses") au comportement de mon mari, sa surveillance omniprésence de tout ce qui fait une vie (dépenses, consommations d'eau, d'électricité, de carburant, fréquentations, loisirs...)... mais peu importe en fait.

Alain a toujours eut un caractère psychorigide, ayant une obsession pour la maîtrise de son environnement matériel et humain...

Wikitionnaire donne la définition suivante des personnalités psychorigides :

"Qui, mentalement, manque de souplesse, d’autocritique, de fantaisie, qui fait preuve d’autoritarisme et de méfiance; Qui se trouve psychiquement dans l'incapacité à se mettre à la place de l'autre. Caractéristique propre aux paranoïaques".

Tout est dit.

Je suis sortie de ça, je travaille jour après jour sur moi, pour me défaire de mes fragilités... Chaque jour est un combat et je ne baisse plus ma garde. Chaque jour est une victoire. Chaque jour est un nouveau pas vers le reste de ma vie.

Merci à toutes les personnes qui me soutiennent.♥♥♥




jeudi 22 octobre 2015

Cauchemars

Ce n'est pas nouveau, je fais beaucoup de cauchemars.

J'ai remarqué récemment que j'en fais d'autant plus quand je me réveille tôt le matin (vers 4h30 ou 5h30) puis me rendors.

Comme si je n'étais plus dans une phase de repos mais de deshinibition de mes angoisses...

Ce sont donc mes angoisses qui prennent le dessus sur le sommeil réparateur. Mes angoisses d'abandon, d'incompétence, de "non réalisation", d'échec... Je suis terrorisée, et je sais que je suis souvent agitée et que je parle beaucoup dans ces moments là (ce qui me réveille, mais je cherche malgré tout à me rendormir, parce que c'est une fuite et parce que mes mauvais rêves me pompent une énergie énorme...

Cette nuit, ce matin, une fois de plus, c'était la peur de l'abandon...
J'étais enfermée dans le vieux camping car de mes parents, dans la couchette amovible (un sommier descendant du plafond du fourgon, avec 50 cm pour se glisser et dormir)... Ce que j'ai pu y faire, des insomnies, dans ce truc là! Impossible de bouger avec ma sœur à coté de moi. Mais là j'étais toute seule, dans mon cauchemar. Les parois du véhicule étaient gelées, givrées, comme couvertes de glace. J'étais persuadée d'être abandonnée et que personne ne se souciait de moi. J'avais désespérément besoin d'être prise dans les bras de quelqu'un qui m'aime, mais il n'y avait que le froid et la solitude. Le froid de la solitude.

.
Je n'étais pas gelée, je n'avais pas froid, au contraire, j'étouffais de chaleur, mais je souffrais. Je crois que j'ai crié, mais il ne se passait rien. Personne ne venait, comme si le camion avait été enfermé en entier dans une congère...

Je ne me souviens de rien d'autre.

Je fais régulièrement des cauchemars, suivis généralement de manifestations psychosomatiques, comme des crises d'urticaire (au niveau du menton ce matin...).

mercredi 7 octobre 2015

J'ai écris à ma mère...

Mes rapports avec ma maman ont toujours été complexes... je l'aime très fort, mais elle porte en elle une colère, une agressivité imprévisible. Des angoisses aussi, très certainement. Une sensibilité extrême, associée à de fortes distorsions cognitives (ce qu'elle perçoit d'une situation ne correspond pas toujours à une réalité factuelle). De la culpabilité aussi. Et une inquiétude au delà du pessimisme concernant l'avenir du monde.

Grandir auprès d'une telle personnalité peut laisser des traces... Surtout quand on est déjà en proie à une hypersensibilité et à des troubles de la personnalité évitante... Quant à savoir le lien de cause à effet entre la personnalité de ma maman et mes problèmes actuels... je ne m'avancerais qu'à dire que ça y a certainement contribué.
En plus d'une multitude d'autres choses.

Plusieurs fois dans ma vie, de l'adolescence à ma vie d'adulte, j'ai essayé de lui parler de certains de ses comportements qui me blessaient, mais elle n'était pas toujours à l'écoute, n'entendait pas (au sens qu'elle ne comprenait pas vraiment ce que je disais ou exprimais).
Parfois, tout de même, elle s'est efforcée de faire des efforts, mais ça n'a jamais duré.

Longtemps, elle n'a eut de cesse de me répéter que je devrais consulter des psys, à propos de ci, de ça... sauf que je consultais, justement, mais que je ne supportais pas l'idée de le lui dire, de peur qu'elle pense que c'était "grâce à elle", qu'elle me "défasse" de mes réussites individuelles pour se les approprier, en quelque sorte (vous arrivez à suivre?).

Elle disait aussi de temps à autre qu'elle devrait suivre une psychanalyse (je pense cependant qu'une thérapie avec un psychiatre pratiquant l'EMDR ou les TCC serait plus judicieux que de blablater des années durant), mais voici plus de 15 ans que je l'entend tenir ce discours et ne jamais passer à l'acte.

J'aime très très fort ma maman. Mais je ne peux plus la côtoyer qu'à faibles doses. Elle m'est toxique émotionnellement, ce qui m'oblige à la fuir. Me sauver. Une forme de colère permanente se dégage d'elle, comme une aura qui m'empoisonne émotionnellement.
C'est très dur à vivre.
De part et d'autre.

D'autant que j'ai fini par "lâcher le morceau", tout récemment.

En effet, après mon hospitalisation à la clinique psychiatrique "La Villa Bleue", entre le 10 mars et le 03 avril dernier, j'ai habité quelque jours chez mes parents, puis chez ma sœur un mois durant, jusqu'à début mai où j'ai emménagé très officiellement dans la toute nouvelle résidence secondaire de mes parents (qui habitent à environ à 45 km de là, c'est à dire de la commune d'Angoulême).

Au début la maison était vide. Seule ma chambre était meublée. Je passais mes journées à lire, à regarder des films sur mon PC et à aller à mon ancienne adresse, me connecter en WiFi sur la box de mon mari, cachée dans la cage d'escalier ou même assise par terre sur le pallier... J'allais marcher.

Mais peu à peu ma mère (bien plus que mon père) a commencé à emménager dans sa résidence secondaire. La cuisine s'est vue envahie de flots de choses et d'autres, avec toutes les descriptions qui vont avec. La salle de séjour, la salle de bain.
Certes, je suis hébergée à titre gratuit, mais ce n'est pas un endroit où je peux me sentir "chez moi".

Un ami m'ayant proposé de m’héberger chez lui, à la campagne, j'ai accepté... Je ne vis donc plus réellement dans la résidence secondaire de mes parents, où je ne fais plus guère que passer de temps à autres. J'y éprouve en effet un sentiment d'insécurité, de colère, de souffrance, avoué par mail...

Ma maman m'a alors répondu une chose qui a été la goutte d'eau faisant déborder le vase de ma gentillesse et de mon besoin de la protéger (elle est très sensible). Je lui ai alors écris un long mail concernant mes ressentis.

Sa question, sa remarque ?
"Et  comment expliques-tu ce sentiment de colère de souffrance et d'insécurité à la TG? Une maison en ville, tu crains une agression, ou bien c'est plus au niveau du symbolique?
Je crois que tu devrais bosser sur cet aspect de ta souffrance"
Je l'explique très bien, et je l'ai fais. Inutile que je copie ici le développement, c'est privé. Cela concerne les sentiments que j'ai vis à vis d'elle, qui me perturbent beaucoup...

Quant au fait "bosser" sur tel ou tel aspect de mes souffrances, je lui ai expliqué le plus posément possible qu'elle était ma maman, et non ma thérapeute, et que donc elle n'avait pas à intervenir dans mon parcours de soins, quel que soit le bien qu'elle me veuille...
"L'enfer est pavé de bonnes intentions", n'est-ce pas ?

Ainsi j'ai écris à ma mère.
Je l'ai ménagée tant que possible.
Je sais par mon père qu'elle va mal, psychologiquement parlant, ces temps ci.
Je suis inquiète pour elle, et triste.

On parle de la cathédrale qui se fout de la chapelle...
Mais ici, il est question d'une cathédrale souterraine (ma mère) et d'une cathédrale "traditionnelle" (moi). Personne ne se fout de personne. Nos trajectoires de vie sont dissemblables, même si liées par sa parentalité et ma filiation, nos souffrances sont discordantes, nos besoins sont différents.

Une seule chose compte.
Nous nous aimons.




lundi 24 août 2015

Vies communes, distortions cognitives et crises de parano...

Ma vie est un peu compliquée, ces derniers temps.

Pour rappel du contexte, j'ai vécu 18 ans avec mes parents, puis 2 ans (en période scolaire) en studio sur l'Île d'Oléron, puis 2 ans environ en studio à Poitiers, puis quelques mois chez mes parents, 3 mois dans un studio tout pourrit.

Ensuite je me suis installée avec Alain, que je fréquentais depuis deux ou trois ans, sporadiquement, entre mes crises de parano et de rejet... "Je suis bien avec toi", puis "t'es con", "t'es gros", "t'es moche...", puis "j'en envie qu'on se voit", etc.

Une relation extrêmement ambivalente, allant de la passion aveugle au rejet total.
Autant dire qu'il en a vue des, vertes, des pas mûres et des archi pourries!

Alain m'aimait.
Moi j'aimais Julien...
Triangle amoureux schizophrène...
Alain et Julien ne sont qu'une seule et même personne... mais la vie moderne a fait entrer les pseudonymes dans la vie ordinaire...
Internet a fait entrer la vie intérieure des gens dans la sphère intime des autres, voire publique (la preuve!).

Julien était mon correspondant coquin (oui, j'ai une vie sexuelle, aussi). Il écrivait bien, il était charmeur et charmant, et, d'un point de vue purement épistolaire, je l'aimais. Quand nous nous sommes découverts "voisins" de département, je suis entrée dans une relation tenant d'une forme d'exhibitionnisme cérébral. J'étais émoustillée, du haut de mes 19 ou 20 ans, par l'idée que cet homme inconnu puisse me regarder entrer au cinéma un dimanche matin, sans se faire connaître.

Le 27 mai 2001, les choses se sont passées autrement. Je lui avais dis que j'allais voir "Amélie Poulain" au cinéma. C'était le dimanche à 11 heure. Dans ma simplicité d'esprit, ce n'était pas un rencart. Il me verrait me mouvoir, me regarderait de loin, m’effleurerait peut être, mais je ne cherchais pas (consciemment, en tout cas) à le rencontrer.
Les choses ont été toutes autres.
Quand je suis arrivée sur le parking, il était là, sur le trottoir à m'attendre. Il m'a regardée dans les yeux et j'ai eu envie d'embrayer la marche arrière et de foutre le camp. Au diable Amélie Poulain. Je déteste ce film. Je n'arrive pas à m'immerger dans les comédie. Mais là n'est pas le propos.

J'étais venue pour le film, j'étais profondément irritée que "Julien" se soit démasqué.
Alain me déplaisait physiquement. Il avait mentit sur son âge, portait la barbe, avait une silhouette enrobée (84 kilos pour 1,65m). Et mon imagination en prenait un coup.

J'ai essayé de lui signifier que je ne voulais pas de lui, mais je n'ai pas su. Il n'a pas comprit.
Sans doute avais-je utilisés des mots dans mes derniers messages qui l'avaient incité à croire que je voulais une rencontre, un flirt.
Mais en cet instant "T" de notre première rencontre, il me dégoutais.
Tous mes fantasmes construits autour de notre correspondance à l'aveugle (pas de photos numériques, pas de cam, à l'époque) s'effondraient.

Nous sommes allés au cinéma et j'en ai été profondément irritée.
Il a payé ma place de cinéma et j'en ai été profondément irritée.
Il m'a caressée la cuisse et j'en ai été profondément irritée.
Mais mon corps avait besoin de contacts, la louve avait besoin d'un loup.
Je me suis abandonnée.

Je suis partie furieuse, un sourire de pacotille aux lèvres, en refusant de promettre qu'on se revoit.
"On verra" ai-je seulement accepté de lâcher.

Je l'ai haïs.
Je me haïssais aussi. Je savais bien qu'au font, j'avais provoquée et même précipitée notre rencontre.

Il est devenu l'objet d'une grande haine de moi même et d'un profond désir.

Tout n'a été qu'ambivalence, en permanence.

Nous nous sommes revus, je l'ai rejeté de nouveau, puis je lui ai réclamé de le revoir, avant de le trahir encore.
Je ne comprend toujours pas pourquoi il s'est accroché à moi.
Trente quatre ans nous séparaient, il vivait en couple (certes bancal, mais je n'y étais pour rien).
Je ne voulais pas de lui tandis que lui semblait croire que j'étais attachée à lui.

Incapable de rester insensible aux sentiments des autres, j'essayais, encore et encore. Je m'imposais d'accepter ses invitations à discuter, lors desquelles je montais dans sa voiture, nous trouvions un coin tranquille et nous passions des heures à dialoguer.
Mais je ne sais pas si je disais vraiment les choses, ni s'il les entendait vraiment...
Ne disais-je pas ce que je pensais qu'il attendait que je lui dise...?
Ne comprenait-il pas que ce qui l'arrangeait de comprendre...?
Nul ne peut le savoir.

À l'époque je n'avais pas encore les bons mots pour décrire mon mal être.

Je ne comprenais même pas que je souffrais en quasi permanence de distorsions cognitives, ces déformations inconscientes de la réalité, me poussant à interpréter en permanence le comportement, les actes, les paroles des autres, et à en tirer des conclusions négatives, à échafauder des théories paranoïaques. Toutes mes journées, et même mes nuits étaient perdues dans ce maelström de déductions hâtives, erronées, basées sur mes pires craintes.

Aujourd'hui encore, ma vie est tiraillée en permanence par ces troubles psychiatriques.
Cela s'est atténué, car j'essaie d'être plus attentive à la réalité. J'ai appris à reconnaître que les autres ne peuvent en aucun cas être tenus responsables de mes ressentis, a fortiori si je n'en parle pas.

Le problème étant que je ne suis pas toujours consciente de ce que je ressens, ce qui est un danger pour toute vie sociale normale.

Ce qui est certain, c'est que je reste extrêmement et exagérément sensible à la critique, du fait de mes doutes permanents et de ma faible estime de moi même.
Malheureusement il est plus aisé d'accuser les autres d'être "méchants" ou indélicats que de reconnaître qu'on est excessivement fragile et auto-malléable.

Alain et moi avons finit par nous fréquenter tant et si bien que nous nous sommes mis en couple en juin 2005.
De mon coté, ça n'a jamais vraiment "marché". Mais j'avais desespérement besoin d'être aimée, qu'on me le dise, qu'on prenne soin de moi.

Dès la première année, en septembre ou octobre 2005, je doutais, je m'interrogeais quant à savoir si je l'aimais vraiment, mais je ne formulais aucun de ces doutes, d'aucune manière. Jamais. Ni à lui, ni auprès de ma famille. J'avais honte.
J'essayais de combler mes failles sentimentales par une relations hyper fusionnelle, mais je souffrais malgré tout en permanence. Alain n'a jamais été l'homme qui me convenait, et je n'ai jamais su le lui dire.

Mes compulsions alimentaires sont allées en empirant... je m'empiffrais à la moindre occasion, j'achetais des vêtements par correspondance, incapable de fréquenter la moindre boutique. J'essayais de combler un vide... un vide sans fond.

Nous avons eut de très bons et très beaux moment ensemble...
Mais la grande majorité du temps je ne faisais que "suivre le mouvement".
Oui. Si tu veux. Comme tu veux.

Mois après mois, je me suis pliée à un style de vie qui ne me convenait pas, sans jamais rien dire, sans me plaindre à personne.
Les courses ensemble, les "balades", l'absence de vie sociale ou culturelle...

Quand j'ai repris mes études, entamant une Licence de Droit en septembre 2005, Alain ne manquait pas de critiquer les horaires des cours, des séances de travaux dirigés et tout aléa d'emploi du temps (cours déplacés, annulés, etc). 
Il me donnait des conseils en méthodes de travail et se montrait désagréable lorsque je "bloquais" sur un exercice. Alors je n'en ai plus parlé. Je ne parlais plus non plus des cours, ayant essuyés plusieurs "j'en ai rien à foutre". Je ravalais ma salive et mes passions et le laissais à son PC, à son jardin...

Je me distrayais sur mon PC, je discutais sur des forums ou des tchat. Tout comme lui, d'ailleurs... Mais parfois sa colère éclatait, parce que j'y passait trop de temps à son gout, parce que... je ne sais plus.

Le pire était quand je discutais à la sortie des cours avec des camarades. Je n'appelais pas systématiquement pour prévenir de mon "retard", étouffée par cette obligation de rendre des comptes en permanence.
La même critique me hante depuis ces années là, blessante et humiliante...
"Quand tu es avec tes copines, je n'existe plus!!!".

Peut-être, justement.
Une pause, un répit dans des routines insupportables.
La faculté était un lieu de vie, même si mes troubles anxieux et ma phobie sociale me la rendait invivable.
Là bas au moins... je pouvais m'isoler.  

Quand le cardiologue d'Alain lui a annoncé, le 12 décembre 2007, qu'il devait être opéré le plus rapidement possible d'une dilatation aortique, je n'ai pas contredite sa déclaration purement factuelle selon laquelle que nous devions nous marier.
Pas plus que je ne l'avais contredit quand il s'était s'agit de conclure un PACS en 2006.

Nous nous sommes donc mariés le 25 janvier 2008, et il a été hospitalisé le samedi 29 mars, et opéré à cœur ouvert le lundi 31, alors que je passais mes dernières épreuves de partiels universitaires le mardi 1er avril. J'ai suivie sa convalescence, lui ai rendu visite régulièrement au centre de rééducation cardiologique.

Mais j'ai passé le mois d'avril 2008 seule, incapable de dire à ma famille que j'avais besoin d'eux, de soutien, de présence.
Personne ne s'est occupé de moi. J'ai été laissée à l'abandon, en friche.
J'en ai longtemps gardé une grande colère contre les miens, rivée à l'âme.
Aujourd'hui, elle s'est évanouie, car je sais que je maintenais inconsciemment les autres à l'écart, trop heureuse de vivre quelques semaines en toute indépendance.

Un an plus tard, en avril 2009, j'obtenais enfin ma licence en Droit.

Dès lors, à chaque occasion, nous partions pour les Hautes-Pyrénées, prospecter pour y acquérir une maison.

Je n'arrivais pas à ne pas être sincère lors des visites. Autrement dit, je disais vraiment ce que je pensais (points positifs ou négatifs!) et Alain ne manquait jamais de me faire sèchement remarquer sa désapprobation. J'aurais dû être plus critique, plus ceci ou plus cela. Je n'en sais rien, en fait. J'avais mal, c'est tout. Je serrais les dents, je me disais qu'il faisait ça pour de bonnes raisons. Il avait forcément raison.

Nous avons achetée une maison. Un "coup de cœur". Une connerie.
L'enchaînement de plusieurs conneries.
Mon travail parce que je croyais, parce que j'étais persuadée que c'était ça qu'Alain voulait pour moi, alors qu'il détestait que je travaille (mais ne me le disait pas, pensant que j'en avais besoin pour être épanouie)... Je détestais ça, j'avais des crises d'angoisse sans arrêt, mais au moins je sortais de la maison, de l'atmosphère écrasante d'une relation à laquelle je ne savais pas comment mettre fin, dont je n'osais parler à personne.
Mes hospitalisations de demi journée, qui ont finies par me rendre plus malade et dépressive que jamais, et auxquelles Alain vouait une haine féroce.
D'autres choses, je ne me souviens plus... 
L'arrivée de la maladie d'Alain. Le parcours du combattant pour obtenir un diagnostic. L'impression soudaine d'être utile, valorisée... Mais aussi les chutes, de plus en plus fréquentes... dont une dans l'escalier de cette maison près de Tarbes. Douze agrafes dans le crâne. Et des colères terribles... à le voir trembler, à me donner envie de mourir, à aller m'enfermer dans la voiture, dehors, pour hurler, pleurer. À vouloir crever.

"Tu me mens, tu me mens tout le temps"...
Une phrase qui est revenue souvent. Là bas, dans les Hautes-Pyrénées. Puis ici, en Charente, quand nous avons emménagé dans notre nouvel appartement, qu'Alain détestait.
Une phrase qui doit être vraie, puisqu'il n'est pas le seul à m'avoir fait ce reproche.

Cette accusation me fait pourtant toujours aussi mal. 

Nous sommes séparés, maintenant.
La maladie d'Alain était devenue tellement envahissante que j'avais commencé à me détruire physiquement.
Hospitalisation. Hébergement chez les uns et chez les autres...

Mais un sentiment d'insécurité permanent. Paranoïa.

Autre chose...
Autre chose, mais toujours la peur au ventre, la peur de l'autre, peur de décevoir, incapacité de dire les choses, la perte de toute rationalité, les crises d'angoisse dissimulées, les mêmes terreurs, les mêmes erreurs.

Jusqu'à la fuite, presque sans explication.

Et le retour à la réalité.
Fracassant.
Une immense tristesse, un sentiment de lâcheté et d'échec terrible, alors que j'étais bien, mieux que jamais, mieux que depuis très longtemps.



Alors la vérité.
Le dialogue, tout simplement.
Et un nouveau départ.

Miss. Try again.