samedi 26 août 2023

Chère mamie Madeleine

Elle était née le 23 septembre 1922 et ils furent 12 enfants.
De cette grande fratrie, ils n'étaient plus que 3.
Ils ne sont plus que 2, à présent.

Le 25 aout 2023, à 100ans et 11mois, ma mamie Madeleine s'est éteinte.

Sa vie a été longue. Je ne saurais dire si elle a été "bien remplie".

Madeleine était veuve depuis décembre 1999 et depuis, elle vivait seule dans son appartement de Joué-lès-Tours.
Un quotidien fait d'habitudes, lesquelles avaient peu à peu été grignotées par la perte d'autonomie. Le phénomène a tout de même été très très lent: ce n'est qu'au printemps dernier qu'elle avait commencé à être éligible à l'aide personnalisée à l'autonomie (APA). Certes, cela faisait déjà quelques temps qu'elle avait des auxiliaires de vie de l'ADMR. Mais cette petite bonne femme de moins d'1m47 (elle s'était tassée, rongée par l'ostéoporose, avec les années) avait du tempérament. Elle continuait sa vie, fièrement. Elle se préparait ses repas, mettait et débarrassait le couvert, faisait sa vaisselle et la rangeait.

Elle avait deux prothèses de genoux.
Une occlusion intestinale l'avait beaucoup affaiblie fin 2008.
Elle était tombée dans sa douche et s'était cassée l'épaule en 2019 (il me semble, en tout cas, que c'était cette année là). On ne l'avait pas opérée, préférant à son âge lui immobiliser le membre et espérer une guérison de l'os, ce qui avait plutôt bien marché.
Elle avait aussi un pacemaker, car le cœur n'était plus aussi vaillant qu'il l'aurait dû.

Madeleine était une battante. Une femme discrète aussi. Peu démonstrative.

Lors d'une visite de ma maman chez elle, fin juin, l'infirmière avait montrée son émotion, les larmes aux yeux après avoir prit ses constantes. Il était clairement question de semaines... Alors maman a fait ce qui lui semblait juste, et même si ça a été épuisant pour elle, je crois que tous dans la famille, nous lui en sommes reconnaissants.
Elle a ramenée Madeleine avec elle à Angoulême.

La famille prévenue, nous avons vues Odette, la dernière sœur en vie de Madeleine, accompagnée comme toujours de Marylène, cousine germaine de ma maman, cérébrolésée de naissance. Il y a eu d'autres membres de la famille, en quelques jours, début juillet, mais j'ai très vite décroché.

L'important, c'est que Madeleine a été heureuse de les voir.
Je me souviendrais toujours de ma mamie, attablée avec nous sur la terrasse, mangeant du chorizo et se réjouissant que "ça pique".

En quelques jours, le lit traditionnel s'est avéré inadapté, alors un lit médicalisé, avec un matelas anti-escarres gonflable à pompe automatique (permettant de varier les zones de pression) est entré dans la maison. Peu à peu les prises en charge médicalisées ont augmenté. Le médecin de Joué faisait des ordonnances pour les infirmières d'Angoulême.

Le reste, les semaines de cet été, ça a été long, et si court en même temps.
J'étais chaque fois très émue quand j'allais chez mes parents et inquiète, parce que ma maman s'est énormément investie, et que j'avais peur pour sa santé à elle. Voir ma mamie, c'était toujours difficile, parce qu'elle était devenue l'ombre d'elle même, brindille de plus en plus vide de vie, desséchée, recroquevillée, tordue sur son lit par la vie qui s'enfuyait.

Hier, alors que j'étais sortie faire une course urgente, mon téléphone a sonné dans ma voiture. J'ai vu que c'était ma maman. Dans le timbre de sa voix, j'ai tout de suite su pourquoi elle appelait.

Un peu perdue, je ne suis pas immédiatement descendue chez mes parents. Mais dans la demie heure, tout de même. Mon père s'était absenté en début de matinée, ma maman n'arrivait pas à le joindre, ni le cabinet médical dont un des praticiens s'était engagé à venir au moment où le constat de décès serait nécessaire.

J'ai aidé maman à arranger mamie dans son lit.
Je me suis simplement efforcé d'être là, autant que possible.
Elle a contacté une amie habitant tout près du cabinet médical, pour qu'elle aille demander au secrétariat que le médecin vienne au plus tôt pour établir le certificat, lequel était indispensable à la levée du corps par les services funéraires.

Ma sœur est venue à sa pause déjeuner.
Mon père a été de retour.
Je suis rentrée chez moi manger un peu, mais, sonnée, je suis retournée chez mes parents.
Le médecin venait de partir.

Épuisée par une tension nerveuse que je ne ressentais pas directement, je me suis endormie dans un fauteuil, puis je suis allée m'allonger sur le lit de mes parents. Mouchette, un des chats de mes parents est venue se blottir contre moi. Puis ma sœur est venue à nouveau, à la sortie du travail.
Nous étions tous là pour la levée du corps.
Nous avons parlé de choses et d'autres, et des obsèques, bien sûr, à Joué-lès-Tours, jeudi prochain, le 31 aout.

La mort fait partie de la vie.
Nous sommes tous tristes et attendris par le décès de Madeleine.
Soulagés, aussi, car elle souffrait et à présent, elle a cessé de souffrir.