dimanche 20 février 2022

Comment je me suis faite truander (mais j'ai réagi assez vite, j'espère)

Samedi 19 février

9h45

J'appelle Bouygues, car ma boite mail associée à ma Bbox m'envoi des mails indiquant qu'elle est pleine et que je ne peux plus recevoir de mail (ce qui est faux, d'ailleurs, puisque j'en reçois). Ça a commencé il y a quelques jours environ, j'ai fais du ménage dans la boite, mais le problème persiste et quand je me connecte directement sur la messagerie (au lieu de mon logiciel de messagerie), j'ai un message en rouge qui apparaît, m'indiquant que 102% de ma boite mail est utilisée... par 55 mails (sans pièces attachées).
Pour moi c'est plutôt source de blague avec les personnes que j'ai au bout du fil (on fait cheminer mon appel de services en services). Le conseiller technique me suggère de modifier le mot de passe de ma bal, je m'exécute, mais cela ne change rien. Du coup il me dit qu'il va enquêter sur le problème et va tout faire pour le résoudre. Il est 10h01 quand je raccroche.

10h16

Je reçois un appel sur mon mobile identifié "Service Client Byg".
La dame m'appelle par mon nom, m'affirme me rappeler par rapport au problème signalé avec ma boite mail, que en raison de la démarche qualité de Bouygues, son appel est susceptible d'être enregistré mais que je peux m'y opposer. Elle m'appelle par mon nom et mon prénom, me cite mon adresse mail bbox et m'encourage à procéder moi même à plusieurs manipulations depuis mon PC.
La "conseillère technique" est gentille et courtoise (un peu coincée niveau humour, par contre).

De fil en aiguille (rétrospectivement je me dis que c'est dingue ce qu'on arrive à faire faire aux gens avec de la malice, quand même!) elle en vient à me faire entrer une "url de dépannage" directement dans mon navigateur Internet. Il s'agit de télécharger un utilitaire de dépannage. Tout est hyper argumenté, elle arrive sur le coup à me faire gober que ma machine et mon téléphone mobile (avec lequel je relève également ma boite mail) sont vérolés par un programme malveillant, me parle de la lenteur de ma machine, etc.
En plus, j'avoue, je suis distraite par un boulot passionnant sur ma tablette (j'ai des notes de réunion à remettre en forme et à documenter).

Je vous passerais les détails, mais j'ai fais plein de trucs qu'il ne faut jamais, jamais, JAMAIS faire, entraînée par un verbiage hypnotique extrêmement bien construit.
- J'ai rentré une url qu'on me dictait par téléphone directement (sans vérifier sa fiabilité via Google ou autre);
- Je n'ai pas déconnecté mon gestionnaire de mots de passe (j'avais rentré le mot de passe Maître la veille... pour 14 jours);
- J'ai entré (arg!) mon numéro de CB sur une interface de paiement ouverte par la page dont on m'a fait entrer l'url en me la dictant (sans vérifier si c'était sécurisé d'une manière ou d'une autre). En théorie, c'est pour garantir mon identité par rapport au logiciel professionnel que je dois télécharger...
- J'ai téléchargé ce programme inconnu sans en connaître la nature et le fonctionnement;
- J'ai chargé une application sur mon téléphone sans en connaitre la nature et le fonctionnement;
- J'ai littéralement laissé une inconnue prendre la main sur mes appareils, à distance
- J'ai coupé toutes les notifications, sonneries, vibreur etc de mon téléphone "pour ne pas altérer le processus" et sans garder un œil sur l'écran de veille (qui me donne des aperçus des sms!)
Et summum de la connerie (et surtout du génie pervers de l'arnaqueuse):
- J'ai réussi à me faire extorquer le mot de passe de mon espace bancaire personnel.

Rassemblez tous ces ingrédients, touillez bien, et vous donnez aux voleurs les moyens de truander le système soi-disant super sécurisé de la double identification des paiements.

Quand cette aimable "assistante technique" a eut fini de me dire que tout était bon, que le problème de ma machine était résolu et que j'ai raccroché, j'ai regardé l'heure et je me suis dis que c'était impossible!

13h45!

J'ai eu une espèce de bouffée de chaleur, avec une sensation de profond malaise et d'angoisse, avec la conviction profonde que je venais de me faire truander. Allez comprendre pourquoi, ma première réaction a été de rappeler le service clients de Bouygues pour demander si on m'avait appelée pour dépanner ma boite mail.
La réponse est tombée, aimable, professionnel: non. On a ouvert un ticket incident, mais c'est en cours de traitement.

Bam!

Ok, j'ai accusé le coup. J'explique à mon interlocutrice ce qui vient de se passer, je lui dis que j'ai reçu un appel de leurs services. Elle m'explique que j'ai reçu un appel d'un portable (0653190919) à 10h16.
Je perd un temps précieux, j'en oublie de regarder mon mobile ou ma boite mail...
Je le fais... mon problème de message d'alerte est résolu mais... je n'ai plus aucun mail dans celle-ci!
Y compris les trucs que j'archivais depuis des lustres. Et imbécile que je suis, mes mails sont en IMAP dans mon gestionnaire de messagerie (donc supprimés aussi là).

Sur le mobile?
D'un seul coup je comprends pourquoi il fallait que je coupe toutes les sonneries y compris le vibreur "pour ne pas interrompre le processus" et que je ne touche pas du tout à mon appareil.
Mon mobile affiche 27 notifications de ma banque avec le code à 8 chiffre de validation de la transaction.
L'application MightyText sert à afficher ses SMS sur son PC, or j'ai laissée la main sur mon PC à une étrangère, sans voir ce qui se passait (écran noir avec un nom de programme à la place).

Je m'en veux et j'ai honte, mais vu les circonstances, ça n'est d'aucune utilité. Il faut faire vite!

Heureusement les SMS de notification comprennent systématiquement le numéro de mise en opposition des cartes bancaires. Je m'empresse de l'appeler.
Je commence à vraiment réaliser ce qu'il s'est passé et le choc me tombe dessus. Sur le coup, en regardant les SMS j'évalue les transactions à environ 500€

Je vous avoue que quand l'opératrice me demande mon numéro de carte bancaire, j'ai un temps d'arrêt. Elle m'explique, habituée, qu'elle sait que c'est dur, mais que c'est essentiel à la mise en opposition.
Oui, bien sûr.
Elle m'explique aussi qu'elle a un ami dont c'est le métier de former les gens en matière de sécurité en ligne qui s'est fait truander d'une manière similaire ces derniers mois, que c'est malheureusement fréquent, bref, elle me met un peu de baume au cœur face à ce viol de mon intimité numérique.

Carte bancaire mise en opposition.
Je n'ai plus de moyen de paiement sauf mon chéquier et un heureux billet de 20€ dans mon porte monnaie.

Je prend ma calculatrice et additionne les chiffres qui figurent dans les SMS.
J'ai la nausée au fur et à mesure que le chiffre augmente...
758,45€
Dont 17 fois 17,19€ (ce qui fait, sachez-le, 292,23€)

Ok ok.
J'ai fais opposition à ma CB.
Je fais quoi maintenant?

Je fais une pré-plainte en ligne, que j'irais signer au commissariat dans la semaine (inutile de faire perdre du temps aux policiers un samedi après-midi, alors que je peux moi même rédiger ma plainte et circonstancier les faits).

J'appelle aussi le service Visa Premier (qui me coûte une blinde), pour leur expliquer les choses. La conseillère que j'ai en ligne compatit à mon malheur et m'explique que je dois remplir un formulaire de contestation d'opérations bancaires, et petite consolation, me félicite de ma réactivité.

Dans l'intervalle, j'ai commencé à changer mes mots de passe essentiels.
La voleuse a eut largement le temps de copier toutes mes données, alors il me semble essentiel de tout sécuriser, surtout les sites "sensibles" (services publics, comptes Google, Microsoft, etc.). Toutefois il faut savoir que ces gens là privilégient tous les achats de produits dématérialisés, sans possibilité de traçabilité: recharges de téléphone, cryptomonnaies (style crédits de jeux en ligne) etc. Bref, des choses qui vont pouvoir être revendues sur Internet, de sorte à blanchir le produit de leurs méfaits.

Je télécharge et rempli le formulaire de contestation. Il ne comprend que 15 lignes d'opérations bancaires, or j'en ai subi presque le double. On est pas sensé cumuler plusieurs opérations sur la même ligne, mais en même temps, à part les notifications par SMS, je n'ai aucune idée des services concernés sauf Topengo (un service de paiements instantanés en ligne, dont j'ai reçu une notification sur mon mobile).

Après tout ça?
Il n'y a plus rien à faire.

J'ai du mal à être sur mon PC ou mon mobile.
Ce ne sont que des outils: c'est l'utilisation qu'on en fait qui en fait la dangerosité, mais je suis encore sous le choc.

J'ai besoin de parler à des personnes bienveillantes.
J'appelle mon père pendant plus d'une heure.
J'ai ensuite ma sœur au téléphone pour une demie heure, et me retrouve à expliquer à ma nièce de 7 ans et demi ce qu'est une arnaque (un vol qui s'appuie sur des mensonges).

Vers 19h30 j'arrive à manger un peu, pour la première fois depuis les 3 biscuits de 9h30.

À 20h10 je me met sur OCS et regarde 2 épisodes de Game of Thrones et l'épisode pilote de "Lovecraft" avant d'aller prendre une douche bien chaude, lire quelques pages de "La roue du temps" et sombrer dans un sommeil à peu près réparateur.

Dimanche 20 février, 5h20

Je me réveille avec de grosses douleurs dans la jambe droite, la vessie et les lombaires. Et tous les autres points douloureux habituels.
Bref, la vie continue.
J'ai fais ce que je pouvais samedi après midi. Le reste arrivera bien assez tôt...

Maintenant, j'ai d'autres priorités.



mardi 15 février 2022

Ainsi va la vie et change l'amour...

Après avoir été amoureuse et connectée à une personne, il me reste l'affection, la tendresse, la gratitude des tous les beaux moments positifs partagés ensemble.

Je suis triste et troublée de ne plus me sentir rassurée, apaisée et nourrie émotionnellement par sa présence.

Restent les souvenirs: Être enjouée et fière de le connaître et de le côtoyer, à cette époque attentive à tout ce qui faisait de lui une personne si spéciale pour moi, dans ma vie. J'étais alors si enthousiaste et galvanisée, pleine d'énergie rien qu'en le voyant, rien qu'en étant assise à ses côtés...

C'est si éprouvant de ne plus ressentir ça.

Ce n'est pas apparu subitement, et depuis l'amorce de cet effritement des sentiments, je n'ai pas cessé d'espérer que ça allait revenir, même en sachant que c'était illusoire.

Je l'aime toujours, mais différemment.

Il compte pour moi, mais mes besoins et mes attentes ne sont plus les mêmes.

Je me sens confuse et coupable de ne plus éprouver les mêmes sentiments. Toutefois c'est exténuant de maintenir un flou qui me met mal à l'aise.

Il est temps que je lui dise posément que je ne peux plus continuer à être tiraillée ainsi.

Certes je garde une certaine envie de lui plaire, de le protéger, de lui apporter du réconfort et de l'apaisement...
 
D'une certaine façon, je l'aime toujours. Mais plutôt comme un ami que comme un amoureux. Il restera un être cher qui compte beaucoup pour moi. Un chéri, mais pas "mon" chéri.

J'ai besoin d'être authentique et en accord entre ce que je ressens et ce que je transmet aux autres.
Même si c'est très douloureux à faire.

Ainsi va la vie.

mercredi 9 février 2022

Hoputainjéééémaaaaaaal (ha, mes aïeux, que je souffre, vous ne pouvez point imaginer)

Lundi 31 janvier.
 
Dans l'après midi, réunion d'équipe à l'association, suivie de la visite d'une maison dans le quartier où on veut déménager.
Actuellement nous occupons un appartement en entresol, sans extérieurs. Il y a 3 marches pallières à descendre, dont une littéralement au pas de la porte. L'avantage de cet appartement  est que les pièces sont vastes, mais c'est à peu près le seul.
C'est très humide, avec un plancher de boiseries qui part en sucette et qui est littéralement mou à certains endroits. Il y a environ 3 ans, il y a eut un affaisement dans le dégagement de la cuisine. Nous avons du acheter un déshumidificateur (combiné climatiseur / chauffage, pour l'avenir). Sans cela, l'odeur de moisi était insupportable...
Entresol, ça signifie en outre que, même si les fenêtres sont vastes, elles sont littéralement au niveau du trottoir. Les huiseries sont tellement vieilles, en bois, sans double vitrage, que ce sont des passoires thermiques. On a des souris et même des limaces (quoique celles ci venaient de la cave et il y a récement eut un traitement chimique contre les xylophages, je pense que ça ne leur a pas trop réussi...). Enfin bref: même si ça fait 65m², nous ne pouvons pas réellement accueillir nos adhérents dans des conditions optimales.
 
Après trois essais infructueux de l'équipe pour trouver un bien à louer plus conforme à notre objet social (maisons visitées, nous tous OK... mais pas les proprios...) c'est la quatrième maison que nous visitons dans le quartier que nous visons expréssement. C'est la présidente de notre organisme gestionnaire, Marie-Françoise, qui l'a repérée. Le propriétaire s'est trouvé des affinités avec elle et il aime l'objet social de l'association, donc il a bloqué les visites de la maison en attendant la notre.
 
Quand on découvre la maison de l'extérieur, toute l'équipe est aux anges.
L'intérieur est bizarrement organisé, car des dépendances ont été avantageusement exploitées, mais on s'en tamponne, on est heureux, c'est génial. On donne notre accord pour lancer le processus de location...On se projette direct, c'est vraiment kiffant.
 
Je rentre chez moi tonique, je range, je fais le ménage, je suis au taquet.
Vers 21h mon chéri arrive, mais je ne suis plus si tonique que ça. J'ai un contrecoup de l'excitation vécue dans l'après midi. Je suis habituée à ce phénomène, et lui aussi.
On fait l'amour mais un truc ne va pas, ça me tiraille et me pince, mais là aussi, je me suis habituée à ces douleurs au fil des décennies, et puis j'ai envie d'être avec lui, de le sentir, de faire partie de la même bulle...
 
Mardi 01er février.
 
La journée commence mal.
J'ai passé une nuit de merde, très agitée et très douloureuse. Mes douleurs chroniques se sont vivement amplifiées. Mon dos me torture, mes épaules aussi, ma cuisse droite me fait vivre un calvaire, comme si on m'avait injecté de la lidocaïne brûlante dedans, et évidemment mal sous les pieds quand je me lève.
Je reste très digne devant mon chéri. Je n'ai pas envie de le bassiner avec mes maux.
Lui même a été malade la semaine dernière.
 
Petit déj' constitué essentiellement d'une boisson chaude (je mange un peu plus tard... le matin, j'ai besoin de m'hydrater avant tout). PC, mails et je me sens de plus en plus fatiguée et surtout j'ai la nausée. Non: j'ai grave envie de vomir, en fait.
 
J'ai aussi de plus en plus mal au crâne, ça me prend toute la tête avec l'impression d'être enflée du ciboulo. Mes douleurs lombaires augmentent. J'ai l'estomac au bord des lèvres. Je prend un antinauséeux. Sans être émétophobe (phobie de vomir), tant que je peux éviter une circulation de fluides gastriques à contresens, je le fais, car quoi que je fasse, je régurgite aussi par les fosses nasales et c'est franchement affreux à vivre.
Et puis d'un seul coup c'est plus possible. Les coliques me prennent par surprise (spasmes intenses de toute la région abdominale), toilettes en urgence. Diarrhée violente, atroce. Je pleure de douleurs. Douleurs au pluriel, car je souffre du dos, des entrailles, des abdominaux...

Lopéramide (anti-diarrhée, j'achète ça par boite de 200 gélules) et Trimébutine (antispasmodique spécifique des voies digestives) immédiatement. J'en prendrais les doses maximales dans la journée, sans effets.

Si ça n'était que ça...

La douleur explose dans tout mon corps, elle irradie et elle pulse dans mes articulations, les mains, poignets, coudes, épaules, côtes sternales et dorsales, hanches, aine, genoux, chevilles... C'est comme si je n'étais plus que douleur. Douleurs style brûlures, pincements, tiraillements, fourmillement. J'ai la totale!
Je prend sans y croire un gramme de paracétamol. Je suis intolérante à l'Ibuprofène et de toute façon, il ne s'agit pas de troubles inflammatoires, donc ça ne servirait à rien.
 
Il faut que je me concentre sur autre chose. Impossible de lire. Regarder passivement la TV, ça me gave vite. J'allume la Xbox et lance Assassin's Creed Odyssey. C'est ce qui va me permettre de tenir toute cette putain de journée. Avant je jouais à Candy Crush Soda ou d'autres "free to play". Mais AC, c'est quand même vachement plus beau, explorer la Grèce antique, ramasser du bois d'olivier et des pépites de minérai, me battre contre les loups, les ours et les lynx. Et trucider quelques brigands, soldats et grands méchants de l'Ordre. Je n'aime pas trop les champs de bataille et les batailles navales, par contre. Le jeu permet de tenir un peu éloignée la souffrance. Truander mon cerveau.
 
J'utilise l'échelle subjective de la douleur.
Les bons jours (qui sont quand même la majorité), j'oscille entre 2 et 4.
Là je fais péter le compteur à 8-9, dans la catégorie "j'veux crever" .

J'envoie un sms à ma meilleure amie (qui me tanne depuis des mois pour que je prenne rendez-vous à l'unité multidisciplinaire d'évaluation et de traitement de la douleur chronique à l'hopital). Elle souffre d'endométriose profonde sévère, les douleurs, elle sait ce que c'est. Pas besoin de circonvolutions pour lui expliquer ce que c'est que "souffrir". Il lui arrive de perdre connaissance à cause de ça, et elle bénéficie de dérivés opiacés. Je pense que ses souffrances à elle sont différentes des miennes, mais incomparables: quand votre voisin est cul de jatte, ça vous fait quand même mal quand vous vous cognez un orteil.

Je devais aller à l'association pour une crêpes partie ce matin, mais là inutile d'envisager avaler quoi que ce soit. Même de l'eau, c'est compliqué. Heureusement le lait d'argile passe mieux. Fondamentalement, c'est de l'eau avec de l'argile verte, ça fait pansement gastrique, et si on compare au bien connu Smecta (qui n'est rien d'autre que de la smectite, une variété d'argile), c'est vachement plus rentable pour moi d'acheter l'argile surfine en boutique bio ou pharmacie que d'acheter des sachets aromatisés orange vanille.
Pour la danse africaine, même pas la peine d'y penser.

Mon amie me propose de passer pour qu'on appelle ensemble le centre de la douleur, mais elle ne pourra que vers 17h. Pas grave, savoir qu'elle pense à moi, c'est déjà énorme.

Je passe la journée blottie sur le canapé, enchassée dans les coussins, sous une couverture polaire, pour tenir le pire à distance. Margaux (c'est mon chat) vient me faire des câlins et semble inquiète pour moi.
 
Vers 16h30, je n'ai pu avaler que 50cl d'eau argileuse de la journée, mais je commence à avoir un peu d'appétit. Un pot de compote de pomme de 100gr passe à peu près. Margaux est très intéressée, elle mangerait bien de la compote, elle aussi. Elle adore les pommes.
 
Vers 17h Chacha arrive. Quand je croise son regard quand elle voit ma tronche, je comprends qu'elle est inquiète. Elle ne m'a jamais vue comme ça. Et pourtant elle m'a déjà vue avoir mal. On a partagé des douleurs similaires, elle m'a vue enfler et désenfler, bref, c'est la seule personne que je connaisse en qui j'ai totalement confiance en matière de compréhension de la douleur. Mais on ne s'est jamais vues quand j'étais en crise.
 
On appelle ensemble l'hopital. Ils m'envoient le dossier par mail.
 
Toute la journée, j'échange des SMS avec mon chéri.
Je préfère qu'il reste chez lui ce soir, je me sens trop mal, trop épuisée, même si la crise commence à passer. J'ai besoin de pouvoir me tourner dans le lit sans craindre de le pousser, de pouvoir ronfler sans qu'il me pousse, car avoir mon orthèse dans la bouche, là, je peux pas. Et puis j'ai besoin d'être seule.
 
Suite à une remarque coquine, je suis obligée de lui décrire ce que je ressens, c'est à dire qu'on me larde le ventre de coups de couteau. Tout ce qui est coquin, là, même en pensée, c'est dans un autre monde pour moi, à cet instant.
Je le sens inquiet, mais je constate aussi qu'il ne comprend pas vraiment ce qui se passe. Et pour cause: je ne lui parle plus de mes douleurs depuis des mois, parce que, de toute façon il ne peut rien pour moi, à part me laisser tranquille quand ça n'est pas supportable. Il a du bol, ces dernières années ça m'est tombé dessus souvent à des moments où il n'était pas là, donc il ne m'a jamais vue comme ça.
 
Mercredi 02 février.

Je me sens mieux. Pas en super forme, mais mieux quand même.
Mon chéri m'envoit un gif animé d'une jolie nana dans un lit qui ouvre la couette et indique de venir la rejoindre... Moi je suis en plein dans mon dossier du centre hospitalier. Je lui répond par ça:

J'ai envie qu'il comprenne que les jours où je ne suis pas bien, ce ne sont plus mes troubles anxieux qui sont en action... Il sont stabilisés, donc c'est OK. Non, ce qui m'angoisse et me déprime, ce sont les douleurs que je vis au jour le jour, et c'est super dur. J'ai besoin qu'il comprenne que c'est chronique, et que c'est donc mon quotidien, même si je ne le lui montre pas.

À midi j'arrive à manger un oeuf poché avec des pommes de terre vapeur bien cuites.

Je fais même des crêpes, car c'est la Chandeleur.

Notre soirée est très planplan, mais ça me va, je suis épuisée.

Jeudi 03 février

On a des trucs à régler avec l'association, mais heureusement la plupart peuvent être faits en télétravail.

Vendredi 04 février

Comme prévu, je participe à une sortie de l'association au Forum Orientation Formations Emploi. J'ai très mal dans la cuisse droite et station debout pénible (7 ou 8 sur l'échelle de la douleur). Je suis épuisée, mais j'ai envie d'être là et de ne pas me laisser abattre.
Le repas au restaurant est ultra pénible (24 autour de la table, c'est à peu près 3 fois mon seuil critique). En plus le repas n'est pas terrible. Bon mais sans plus, et le contenu de nos assiettes est franchement minable.
Si j'avais su j'aurais pas venue.
...

Mercredi 09 février.
 
J'ai mal. À plein d'endroits. À 2 ou 3 sur l'échelle de la douleur.
C'est une journée normale.