dimanche 24 décembre 2017

Fêtes de fin d'année


La période des fêtes de fin d'année n'est plus un agréable moment depuis longtemps pour moi. Je ne fais pas le compte du moment où ça a commencé à être douloureux pour moi, mais ça a été tôt.

Noël est une belle fête dont j'ai toujours aimé l'esprit. 🎄🎅
Malheureusement mon onirisme intérieur n'a jamais concordé avec ma réalité. Encore moins ces dernières années.

À la télévision on nous vend du rêve avec des intérieurs bien rangés et des décorations superbes, des laits de poule et des canes de sucre torsadées, des chorales douces, des films de saison, des téléfilms pour les enfants remplis de rêves...

Il y a longtemps que je ne rêve plus.
La maison de mes parents ne s'est jamais métamorphosée en palais des rêves pour la période des Fêtes de fin d'année. Pas plus, malgré mes efforts, que mes logements successifs. On n'a jamais fait qu'ajouter de la poudre à perlimpinpin sur le quotidien.

J'ai vu des intérieurs où la "magie de Noël" était présente, mais jamais chez moi.

Ne pas comprendre les autres et ne pas être comprise en retour me pose de nombreux problèmes au moment des Fêtes auxquels la plupart des gens normaux ne pensent pas.

Que fête-t-on dans une famille athée comme la mienne?
Une famille réduite à mes parents, ma sœur et moi, et nos grands parents, quand ils étaient encore en vie (mes grands-parents maternels, car nous passions le déjeuner de Noël chez mes grands-parents paternels, plus proches géographiquement). Il ne nous reste que ma grand-mère maternelle, aujourd'hui.

Que fêtait-on, alors, dans nos vertes années jusqu'à l'adolescence ? Nous, les enfants, pour l'essentiel. Ainsi que les grands-parents, heureux d'offrir ce qu'ils peuvent aux êtres aimés, heureux de voir leurs petits enfants eux aussi heureux.
Est-ce que j'étais heureuse, moi? Je ne me souviens pas.

Les cadeaux de Noël me sont très vite apparus comme un terrain miné. Entre les pulls qui gratte et les cadeaux bien intentionnés qui me révulsaient... Car quand on cherche à faire une surprise à quelqu'un, on offre généralement ce qu'on aime, ou alors ce qu'on pense que les autres vont aimer. Sauf que je ne peux pas vraiment dire que mes goûts aient été bien connus dans ma famille, d'où des difficultés évidentes à me faire des cadeaux. Question cadeaux, parfois on pense respecter une demande, mais en voulant bien ou "mieux" faire, on se prend les pieds dans le tapis.

Je tirais une grande satisfaction de certains cadeaux, à une époque, plaisir qui s'est étiolé quand j'ai commencé à recevoir des choses sans intérêt à mes yeux, sans comprendre que l'intention est plus importante que le résultat, et montrant un dédain involontairement cruel face aux bonnes intentions de mes proches. Je n'avais pas encore compris que je n'étais pas sensée faire preuve de cette sincérité, mais accueillir les cadeaux tels qu'ils étaient, c'est-à-dire remplis de l'intention de faire plaisir.

On excuse le "caprice" d'un petit enfant déçu par un cadeau qui ne lui plait pas, on vit sans doute beaucoup plus mal le mauvais accueil fait par une jeune adulte de 18 ou 19 ans, voire plus, fait au micro-onde qu'elle a demandé (mais pourquoi m'avoir acheté ce modèle de marque, trois fois plus cher qu'un four "standard" et plus encombrant, avec une capacité de cuve inférieure???), ou le cuiseur pression (ça n'était pas ce modèle là que je voulais, bon sang!) ou encore la sauteuse en inox  (j'avais pourtant bien demandé la sauteuse de telle marque, et pas ça!!!).

Je me rend compte, avec le recul, que je me suis souvent montrée profondément blessante vis à vis de personnes qui cherchaient avant tout à me faire plaisir (mais dont certaines n'aiment vraiment pas faire les achats de Noël). Quoi qu'elle aient pu en penser, ça n'était pas du tout contre elles, ça n'était pas parce que ça venait d'elles et je ne les déteste pas.

Le fait est que je me suis peu à peu efforcée de donner des consignes précises pour qu'aucune erreur ne soit plus commise. Ça ne les a pas empêchées, bien entendu, mais cela les a limitées.
Sans compter les cadeaux surprise qui se veulent "super" et tombent en fait complètement à plat. Du genre de l'objet de déco bien encombrant qui arrive à point nommé alors qu'on essaie de se défaire de ce type d'objets.

C'est le lot de toutes les familles, de tous les cadeaux, pour toutes les occasions.
C'est normal, ça fait partie de la vie, mais je fais preuve d'une intolérance exacerbée à ces surprises et imprévus.
Je déteste être ainsi, j'éprouve même ce que je qualifierais, sans exagération, une haine viscérale contre moi-même, lorsque je ressens cette intolérance m'envahir, accompagné d'un grand sentiment de honte.
Comment aimer les Fêtes quand elles sont susceptibles d'engendrer de tels tourments?

Noël, quand les enfants sont "grands", qu'ils ont perdu leur candeur enfantine, qu'ils voient le monde tel qu'il est, et qu'ils n'ont pas encore eux-mêmes des enfants avec qui revivre ces instants précieux, dans une famille athée, donc, qu'est ce que c'est, qu'en reste-t-il?
Une coquille creuse, une sorte de rituel institutionnalisé par la société hyper commerciale.

Ça a été une grande souffrance pour moi, de vivre cet effritement.

J'ai essayé de lutter, de faire en sorte que les Fêtes retrouvent le verni de mon enfance, je me suis mise à faire des biscuits de Noël, à en distribuer tout autour de moi, comme si contre ce tribut, les autres mettraient davantage d'eux-mêmes pour que les choses soient réellement festives.
J'ai demandé à mes parents à ce qu'on organise un repas avec toute la famille (mes grands-parents paternels, mon oncle et ma tante venant nous rejoindre pour le réveillon), espérant y trouver du réconfort. Malheureusement je n'ai fais que m'exposer davantage aux discordes et dissonances entre les uns et les autres.
Plus rien n'a plus jamais pu être comme avant après cette année là.

Les repas de Fête sont inégaux par définition.
Tout le monde ne conçoit pas les choses de la même manière et c'est tant mieux. Mais ça peut devenir l'enfer pour bien des raisons...

Certains aiment se réunir en grandes assemblées, d'autres préfèrent rester entre parents proches.
Certains privilégient des menus similaires d'année en année, sans surprises mais avec une joie renouvellée, d'autres aiment élaborer des menus d'exception différents chaque année.

Passer d'une habitude à une autre n'est pas forcément bien vécu par des personnes comme moi, assez intolérantes aux changements.
Ça n'a pas compté, pour moi, que l'important était de passer un bon moment en famille.
J'ai seulement vécu avec violence le passage du menu "habituel" des toasts aux œufs de lompe, huîtres, foie gras, pintade (ou autre), fromage et bûche (menu qui connaissait certes quelques variations d'années en années, mais relativement peu).
Ma mère, avec plein de bonne volonté et une réelle envie de cuisiner s'est mise à tester des nouveautés. Malheureusement sur la base de ses propres préférences gustatives. Je ne lui en fais pas le reproche, "les gouts et les couleurs, ça ne se discute pas".
Mais maman apprécie un certain nombre de saveurs que je ne supporte tout simplement pas, comme l'amer qu'on retrouve dans certains apéritifs tels le martini ou la Suze, ou l'anis de la badiane et quelques autres...
J'ai un souvenir bouleversant de dégout d'un sauté de noix de pétoncles au Noilly.
J'adore les noix de Saint-Jacques et les pétoncles. Je supporte mal la saveur des vermouth en général.

L'attente enthousiaste des bons moments s'est transformée en appréhension devant l'élaboration de repas nouveaux, cassant les habitudes que je vivais comme fermement établies.
Ça allait avec l'époque : on voyait apparaître dans les magasins profusion d'ingrédients exotiques "à la mode" tels que steak d'autruche, de kangourou et autres viandes ou poissons venus d'ailleurs.

Mais j'ai quitté la maison.
Je me suis retrouvée embarquée dans des repas de Noël à l'opposé du petit monde restreint de mes parents et grands-parents.

Mon mari avait une famille nombreuse et ils se réunissaient presque tous sous le regard bienveillant de leurs parents, chaque année le soir du 24 décembre. Cinq des frères et sœurs de la fratrie (sept au total, mon mari étant l'aîné), avec leurs époux (dont moi), leurs enfants et les conjoints de ces derniers. Parfois près de quarante personnes autour d'un alignement de tables dans un sous sol.

J'en avais la nausée. Je n'avais véritablement ma place nul part dans cette assemblée, étant bien plus jeune que mon mari mais ne pouvant en être séparée par les convenances familiales, sans affinités particulières avec les neveux et nièces de mon mari. Alors on m'asseyait souvent près de mes beaux-parents, placés eux à peu près à mi-chemin entre leurs enfants et leurs petits enfants.

Le repas sortait des ateliers traiteur de la grande surface locale, mais je m'en fichais.
Devoir afficher un sourire de complaisance, attendre entre les plats de façon interminable, me geler les pieds est gérer l'angoisse générée par cette grande assemblée suffisait généralement à me couper l'appétit.

Entre Noël et la Saint-Sylvestre, il n'était pas rare que nous ayons les enfants de mon mari à la maison. Je m'efforçais de cuisiner "festif". Cela n'a pas évité, en quelques occasions, des conflits verbaux entre convives, ce qui ne manquait pas de me plonger dans une grande détresse émotionnelle.

Pour le réveillon du premier de l'An, mon mari avons, durant environ cinq ans, tenu compagnie à mes beaux-parents, perpétuant une tradition familiale bien ancrée.
Était-ce parce que mon mari était l'aîné qu'il agissait ainsi, était-ce un moyen pour lui de se faire bien voir, ou, plus basiquement une façon d'éviter d'inopportunes invitations tierces, lui qui se disait misanthrope? Je ne sais pas.
J'aimais cuisiner et j'essayais de préparer des choses simples mais festives pour les parents de mon mari. Ma belle mère aimait tout ce que je préparais et c'était un plaisir de cuisiner pour elle. Mon beau-père ne laissait rien voir. Mon mari oscillait entre les félicitations et une neutralité teintée d'agacement que je m’efforçais d'ignorer. Moi, je cuisinais, m'investissant dans une tâche me vidant l'esprit, faisais le service, débarrassais, faisais la vaisselle et partais dormir éreintée.

Quand nous sommes partis vivre dans les Pyrénées, ma belle mère était décédée et mon beau père partit en établissement.
Noël et la Saint-Sylvestre nous appartenaient.
J'étais la femme aux fourneaux et je gérais les choses, malgré tout, j'étais de plus en plus en difficulté face aux Fêtes. Mon mari était exigeant sur le montant maximal des dépenses. Notre premier réveillon là bas a été fait de surgelés "festifs" bon marché. Les années suivantes, sa maladie avait commencé à empiéter sur notre vie, mais j'ai malgré tout essayé de maintenir l'effort, ne serait-ce parce que ça me sortait du quotidien.

Quand nous sommes revenus vivre en Charente, je n'avais plus du tout envie de célébrer les Fêtes de fin d'année. J'étais en dépression sévère, mon mari allait de plus en plus mal et me maltraitait psychologiquement jour après jour comme si j'étais responsable de sa maladie.
La fin de l'année 2014 a marqué une sorte de point de non retour, dans la maladie et dans la peine.

J'ai essayé de contrer les choses en décorant l'appartement, en illuminant le balcon de lumières scintillantes, suspendant guirlandes et autres décorations ici et là, m'offrant des "coussins peluches" qui me faisaient régresser en enfance et que je serrais contre moi quand j'étais en proie à la peine et la douleur de ma vie et de celle de mon mari.

Je ne me souviens plus comment nous avons célébré les Fêtes cette année là.
Ça n'a pas la moindre importance.

Je me souviens à peine de 2015 et de 2016.

Nous voici le dimanche 24 décembre 2017 et j'avais envisagé de ne pas réveillonner.

Finalement j'ai acheté un peu de saumon fumé, un magret de canard, un mélange de champignons et des bûches glacées individuelles. Je ne sortirais pas les décorations de Noël, mais je dinerais en buvant un ou deux verres de Buzet sur mon magret accompagné de patate douce cuite au four et mes champignons des bois sautés avant de déguster une clémentine et mon dessert.


J'essayerais de dissiper les cauchemars qui envahissent mes nuits... ces rêves blancs de contes tristes où le givre s'accroche peu à peu aux larmes gelées qui bordent mes paupières closes, alors que je plonge dans un sommeil dont on émerge pas. Ce sommeil dépourvu de souffle et de battements de cœur, qui fige une femme-enfant dans le calme et la paix, délivrée d'un esprit trop torturé.

En 2018 je commence une nouvelle psychothérapie.
Il est plus que temps.

lundi 4 décembre 2017

Recherche de thérapeute TCC : fausses pistes

Depuis le début de l'été 2017 environ, ma psychiatre (ou plutôt mon ancienne psychiatre, puisqu'elle ne me donne plus de rendez vous) m'encourageait à trouver un thérapeute spécialisé en thérapies comportementales et cognitives, afin de m'apprendre à mieux gérer mon stress, mes émotions et surtout à développer mes habiletés sociales.
Le problème étant que sur Angoulême, la chose n'est pas si facile que ça.
Entre les psychologues (normalement non remboursés par la sécu) qui prétendent qu'ils pratiquent les TCC, mais qui en réalité vous "prennent" 50€ la séance pour pas grand chose et les fausses rumeurs sur tel ou tel psychiatre, je n'ai pas encore trouvé de nouveau suivi thérapeutique.

Autrement dit, ça fait depuis fin juin que je n'ai plus de suivi régulier, alors que les tuiles pleuvent et que j'ai pas mal de stress à gérer.
En juillet, aout et septembre, j'ai vu une psychologue gentille (mais malheureusement incompétente), à raison de deux séances mensuelles, et j'ai rapidement arrêté de la voir. On ne donne pas des "exercices" qui nécessitent une vie sociale à une personne qui n'en a pas. Les choses frisaient le ridicule.
Il m'a fallu pas mal de courage pour me relancer "en quête", et alors que je pensais avoir trouvé la perle rare, la psychiatre qu'on m'avait indiqué m'a appelé ce matin suite à un courrier que je lui avait adressé : il s'avère qu'elle ne pratique absolument pas les TCC mais la psychanalyse!!!
Des études OMS ont montré que l'impact thérapeutique de la psychanalyse est égal, voire inférieur à celui d'une simple discussion entre deux personnes lambdas. Dans certains cas, c'est même nuisible à l'équilibre émotionnel des patients.

Bref, me revoici partie en quête.
Et à court terme, je pense que je vais tout simplement m'adresser au CMP, comme je l'ai fais par le passé, en espérant qu'un psychologue veuille bien me prendre en charge. Mais vu que dans deux mois je rentrerais probablement en formation, ça va être compliqué de caler des rendez-vous...

Je vais finir par appeler tous les psys de la région, même si je déteste le téléphone!

dimanche 3 décembre 2017

La gazette juridique, décembre 2017

Dernières infos en date, je suis convoquée avec les aimables fils de mon défunt mari devant la Cour d'Appel de Bordeaux, en qualité de témoin. Une affaire en lien avec des prétentions pécuniaires de l'ancien tuteur de mon mari.

Pour la jouer courte, à la fin de la tutelle (c'est à dire au décès de mon mari), le mandataire judiciaire qui avait la charge de la protection des intérêts de mon mari a demandé à ce que lui soit accordée une indemnité pour des actes exceptionnels.
En effet certains textes prévoient que quand une mesure de protection juridique entraîne une implication plus importante que la "normale", le tuteur peut toucher plus d'honoraires. Car une tutelle gérée par un tiers à la famille est payante (c'est une prestation de service, au même titre que les services d'un avocat ou d'un notaire).

En soit, je comprend la démarche. Il est vrai que la tutelle de mon mari a été lourde à gérer. Pour ne pas avoir à la gérer, j'avais demandé à être moi aussi placée sous mesure de protection. Ce que j'ai obtenu, mais mon mari ayant tellement bien réussi à me manipuler, je me suis accusée de maux que je n'avais pas et au lieu d'être placée sous curatelle simple, j'ai eu à subir une curatelle renforcée.
Il est vrai cependant que j'étais très agitée intellectuellement à l'époque et que ça se ressentait pas mal dans les courriers que j'adressais au Tribunal des Tutelles.

Bref.
J'ai enclenché les procédures de mise sous protection juridique pour moi et pour mon mari début février 2015, avant mon hospitalisation en clinique de santé mentale, après que le neurologue de mon mari eut reconnu que sa maladie justifiait une telle mesure, mais que l'expert en neurologie pour les tribunaux qui l'avait examiné fin octobre 2014, alors que j'étais hospitalisée en séjour court de psychiatrie, ait déclaré le contraire (parce qu'il n'y avait pas de signes de pertes cognitives, sans égard pour le fait que pour passer des actes juridiques il faut pouvoir parler et écrire).

Il est important de signaler qu'il n'y a jamais eut d'expertise psychiatrique de mon mari. Et même s'il y en avait eut une, il n'est pas certain qu'elle aurait révélé la cruelle vérité sur son état d'esprit et sa personnalité profonde. Les pervers narcissiques sont de très bons menteurs et ils excellent dans la manipulation de leur entourage.

L'ancien tuteur estime que sa tâche a été plus ardue qu'elle n’aurait du l'être. Il a été débouté en première instance. Les motifs, en gros, expliquent que la nature de la maladie d'Alain faisait que c'était prévisible.

Moi, ce qui me fait enrager, c'est que le mandataire judiciaire qui demande aujourd'hui de l'argent pour son investissement dans sa mission n'ait pas compris (ou pas voulu comprendre?) qu'il se faisait manipuler.

Il en était arrivé à avoir un entretien par semaine avec Alain (contre un par mois dans une tutelle "ordinaire"), a considérés les "tensions entre l'épouse et les fils" en grande partie sous l'angle de vue... d'un des fils de mon mari (ils étaient en grande discussion dans la salle d'attente du tribunal, le jour où la juge devait tous nous entendre quant à la justification d'un placement sous tutelle)... en outre, ce mandataire s'est un petit peu emmêlé les pinceaux dans les faits, affirmant que "pour pallier à mon absence", les fils de mon mari avaient "mis en place des aides à domicile" et patati et patata.
Ha?
Comment se fait-il, dans ce cas, que ça soit ma signature qui figure sur tous ces contrats d'aides, en ce cas? J'ai du louper une étape, ou alors c'est le mandataire judiciaire qui s'est prit les pieds dans le tapis du rappel des faits (je rappelle que j'ai une licence de droit, périmée certes, mais je me souviens quand même que c'est une des premières choses qu'on enseigne en première année : faire un rappel correct des faits).

Le monsieur estime qu'il a mit en place des "diligences longues et complexes", comme par exemple les visites réalisées pour restituer à mon mari les actions de représentation diverses. Mais également le temps consacré à "certains tiers" (je ne sais pas à quoi ça correspond).

Il faut bien comprendre que le jugement de placement sous tutelle de mon mari ne tenait compte que de sa vulnérabilité physique. Pas morale. Or une chose terrorisait tout particulièrement mon mari : la perte de contrôle.

Le contrôle sur son corps était une bataille de chaque instant, évidente pour toute personne un tant soit peu attentive.

Sauf que le contrôle qu'Alain exerçait sur les autres était au moins aussi important pour lui. 

Concernant les besoins spécifiques d'écoute de mon mari, évoqués par le mandataire, je ne suis absolument pas étonnée. C'était pathologique, chez lui. Il fallait qu'il soit informé de tout et il considérait ça comme un dû.
Ce "besoin", je l'ai subi pendant des années, comme une prison.

Il est évident qu'il ne pouvait pas agir de la même manière avec un mandataire judiciaire qu'avec une jeune femme angoissée, cependant, j'ai très tôt essayé d'alerter le tuteur et son collaborateur de cet aspect de la personnalité de mon mari.

Je ne pense pas qu'on ai jamais tenu compte de mon point de vue sur la question. Donc, même si ces besoins, très importants auraient pu mettre en alerte la tutelle quant à la possibilité que le majeur protégé soit porteur de troubles de la personnalité voire d'une pathologie psychiatrique, ils n'ont jamais tenu compte de cette éventualité.
En conséquence, on a toujours considéré que mon mari était "lucide" et que ses choix n'étaient entachés d'aucune altération de jugement...

Toutefois, bien que dans son examen, l'expert neurologue n'ait relevé aucun trouble de la personnalité de nature... neurologique, celui-ci s'est totalement abstenu de tenir compte du fait que le patient qu'il examinait pouvait malgré tout présenter des troubles d'une autre nature, influençant son caractère, comme je l'avais plusieurs fois expliqué (sans jamais être prise au sérieux). Cet expert se cantonnant strictement à son domaine d'expertise avait en outre totalement éludé le fait que, si de tels troubles de la personnalité existaient, la DCB pouvait les aggraver.

Le fait est que mon mari "gérait" extrêmement bien ses "travers" depuis des décennies et les quelques "dérapages" dont il avait fait preuve en public depuis qu'il était tombé malade pouvaient facilement être mis sur le compte de l'anxiété et de la dépression due à sa maladie.

Malheureusement, la DCB a effectivement levé certaines inhibitions, et mon mari s'est avéré peu à peu incapable de contrôler les aspects les plus narcissiques de sa personnalité.

Il voulait être aimé et il voulait avoir le contrôle.

Cela l'a parfois conduit à des attitudes contradictoires, et ça bien avant que son cortex basal ne commence à s'effriter.

Je l'ai vu me dire des choses et déclarer l'opposé à des tiers, ou agir de cette façon avec deux parties tierces... Je l'ai entendu se plaindre des dizaines de fois de certaines personnes, trop "exigeantes", puis déployer des efforts considérables pour "impressionner" ces mêmes individus et leur prouver qu'il était tout à fait apte à accomplir certaines choses... avant de les maudire dès que ces gens disparaissaient du paysage, les accusant sans vergogne de ses malheurs...

J'étais habituée à ce que je percevais alors comme une forme de "mauvaise foi", sans me rendre vraiment compte que l'objectif réel était de se sentir "meilleur" et plus performant que les autres, de "leur en montrer" sur ses capacités. Même s'il devait m'humilier au passage, voire en laisser d'autres m'humilier ou me faire du mal.

De son vivant, avant d'être atteint par la DCB, mon mari, avait toujours fait preuve d'un perfectionnisme poussé à l'extrême, avec un niveau d'exigence tel que personne ne trouvait véritablement grâce à ses yeux, que ce soient ses collègues, ses proches, ses fils, ses épouses, puis les aidants professionnels.
Alors je doute qu'il ait jamais trouvé son tuteur légal à la hauteur de ses attentes.

Ho oui, mon mari avait bel et bien cette grande "force morale", que certains ont salué après sa mort. Il avait effectivement des "valeurs morales" très fortes.
Mais déviantes.

Pour exemple, quand sa première épouse a demandé le divorce, il a tenté de conserver la moitié de l'indemnité compensatoire qui avait été versée à celle-ci (après qu'elle se soit fracturé le dos et soit demeurée paralysée). Ce genre d'indemnité est versée nominativement et n'entre pas dans le patrimoine commun d'un couple, même marié sous le régime de la communauté. Or, Alain a toujours estimé qu'il avait été "aussi" lésé que son épouse par son accident et considérait donc avoir des droits sur cet argent.

Aux yeux d'Alain, seules ses règles étaient les bonnes, seuls ses horaires étaient acceptables, et les actions de toutes les personnes gravitant autour de lui devaient impérativement lui convenir. Un changement d'horaire était considéré comme une atteinte à sa personne et il faisait preuve d'une agressivité extrême envers un ou plusieurs tiers dès qu'il était contrarié.

Je m'étonne véritablement qu'il ait préféré rester en hospitalisation à domicile, avec tous les aléas que cela impliquait, plutôt que d'accepter d'être admit en USLD, où les équipes ont des horaires rodés. Quoique je sais qu'il pouvait également être sous influence...
Sans compter certains secrets qu'il a cherché à préserver le plus longtemps possible (bien après son décès pour certains).

Mon mari était un menteur très organisé, capable de le faire de manière très "rationnelle" et sans sourciller. Il faisait preuve d'une capacité incroyable de dresser les uns contre les autres, ou pour rabaisser toute personne le contredisant, à moins qu'il eut conscience que cela risquait de jouer contre ses intérêts.
Il pouvait humilier, dénigrer, blesser ou rabaisser volontairement, critiquant en permanence les autres, ouvertement ou au contraire sans en avoir l’air, sans jamais se sentir coupable du moindre malaise ainsi généré.
Si on le lui faisait remarquer, il niait toute intention malveillante et démontrait même que c'étaient les autres les fautifs. Il était ainsi capable d'affirmer à une personne une chose, son opposé à une autre, puis mettre en doute la parole de la première, sans sembler être ému par la souffrance morale occasionnée de part et d'autre devant les confrontations générées.

Au tout début de notre relation, il a ainsi su me faire croire qu'il partageait les mêmes valeurs que moi, les mêmes objectifs de vie, la même philosophie, les mêmes goûts. Il m'encourageait dans ce que je faisais, il louait mes "talents", mon intelligence, mon honnêteté et ma sincérité.

Mais rapidement, il m'a également très insidieusement découragée d'intégrer une formation qualifiante (je voulais entrer en BTS de secrétariat) au profit d'un cursus universitaire qu'il a tout fait pour me faire arrêter une fois le DEUG ou la licence obtenue. Il me connaissait et connaissait très bien le système scolaire supérieur. Il savait donc que je pourrais pas trouver d'emploi avec une licence générale, mais il m'a malgré tout encouragée dans cette voie.
Durant quatre ans, il a cependant dénigrés les enseignements que je suivais, m'a répété régulièrement que j'étudiais mal (sans me prodiguer de conseils pour autant), et s'emportait parfois contre moi lorsque des cours ou des examens étaient déplacés (ou programmés) sur des horaires ne lui convenant pas.

Après moins d'un an de vie commune, il m'a proposé de conclure un PACS, sans dissimuler aucunement qu'il agissait par intérêt financier (étudiante sans revenus, j'étais un excellent outil de défiscalisation).

Au yeux de la plupart, il semblait serviable, généreux, digne de confiance. Mais tout ça n'était qu'un écran de fumée.

Il m'a séduite en usant de manœuvres et de stratagèmes, notamment en se créant des identités factices sur Internet, qui était alors mon seul outil de socialisation (ce dont il avait connaissance), et m'a menti tout au long de notre vie commune sur des choses dont il savait qu'elles me tenaient à cœur (notamment des soi-disant connaissances communes qui n'ont jamais existé, n'étant que des alias qu'il utilisait pour correspondre avec moi et connaître ma façon de penser).

En outre, il a fait en sorte que je vive de plus en plus isolée au fil du temps, n'ayant que lui et lui seul comme point de référence. Quand je sortais, même pour une balade à pieds, je devais lui dire où j'avais été, si j'avais vu des gens, qui, etc. Quand j'étais à l'Université, je devais lui envoyer un sms une fois arrivée à la fac, l'appeler à midi, lui envoyer un sms en partant. Cette exigence a continué sur mes premiers emplois en intérim, puis quand j'ai été assistante de vie à Tarbes.

Alors qu'il était déjà malade et que je n'allais moi même pas bien, un rendez-vous au CIDFF de Tarbes, début 2014, m'a permit d'entendre que mon mari me faisait vivre en situation de maltraitance psychologique. Malheureusement je n'étais pas en état de "l'abandonner".
Plus tard, des psychiatres, psychologues et intervenants du dispositif départemental contre la violence conjugale, en Charente, ont confirmé que j'avais tout de la victime d'un pervers narcissique.

J'ai déposé une plainte pour violences conjugales. Normalement la loi précise que les violences conjugales réprimées par le code pénal peuvent être de nature psychologiques (article 222-14-3 du Code pénal) et incrimine spécifiquement le harcèlement dans la sphère privée (article 222-33-2-1 du Code pénal). Un délit qui se traduit par des agissements répétés ayant pour conséquence une dégradation des conditions de vie. Le harcèlement se caractérise par une succession de comportements, qui peuvent être insignifiants de prime abord, mais dont l’accumulation entraîne une dégradation des conditions de vie de la victime, laquelle se manifeste par une altération de la santé physique ou mentale et ces faits peuvent théoriquement être réprimés lorsqu’ils sont commis par le conjoint. Malheureusement c'est très compliqué de prouver des séquelles psychologiques, vous voyez. A fortiori quand on souffre déjà au préalable de troubles psychiques.

J'ai vécu ça pendant 10 ans. Et quand j'ai déposé plainte, j'ai eu droit à un non lieu à statuer
: je ne vivais plus avec mon mari, il n'y avait plus "péril en la demeure". Je restais sans moyen de démontrer d'une manière quelconque que mon mari était dangereux pour les autres. C'était bien avant qu'il soit seulement mit sous sauvegarde de justice. Je n'ai recouvré le souvenir des actes physiques qu'après son décès, et la prise de conscience de l'ampleur de mon déni a été d'une violence terrible.

J'ai essayé de prévenir la juge des tutelles, puis le mandataire judiciaire (celui qui réclame des indemnités exceptionnelles) quant à la personnalité profonde de mon mari, mais il est vrai qu'à cette période chaotique de ma vie, j'étais passablement perturbée, tant par l'emprise que mon mari continuait d'exercer sur moi, que par mes troubles anxieux, aggravés par le comportement particulièrement hostile de certains membres de la famille de mon mari.
Toutes sortes de choses ayant rendu mes messages d'alerte bien trop confus, je suppose.

En marge de tout ça, je ne peux pas m'empêcher de m'interroger sur l'efficacité de la tutelle, puisque certains actes, qui avaient été passés "par mon mari" à une époque où il était déjà incapable d'établir le moindre écrit depuis des mois, n'ont jamais été remis en cause par le mandataire, alors même qu'Alain était alors... sous sauvegarde de justice!

Juridiquement, je trouve donc les choses "légèrement" contestables.
Dans ce contexte, la réclamation d'une indemnité exceptionnelle me semble un peu "déplacée", forcément. D'autant que, parmi les actes en question, il y a eut l'arrêt pur et simple, sans préavis, du virement mensuel que m'octroyait depuis des années mon mari. C'est à dire l'arrêt total de ce qui restait de sa contribution aux charges du mariage.
J'ai été choquée quand on a ensuite demandé à mon curateur de payer l'assurance et l'entretien de la voiture (appartenant, certes, en propre à mon mari) mais que j'étais la seule à avoir besoin d'utiliser.

De même, après l'inventaire des biens "propres" de mon mari (obligatoire pour la tutelle), j'ai été bien surprise par certaines erreurs commises, alors même qu'il a été fait en présence de témoins (de mauvaise foi?). Certains biens inventoriés comme "propres" à mon mari faisaient en réalité partie de la communauté, voire m'appartenaient en propre (dont un fauteuil très confortable, avec position "relax" qui était un cadeau que mon mari m'avait fait, personnellement pour Noël 2012).

Dans la demande du mandataire, ancien tuteur de mon mari, j'ai aussi eu la surprise qu'il nous déclarait "séparés de corps" (c'est un régime juridique très particulier). Or, à moins que le droit de la famille ait fondamentalement changé depuis mes années d'études, une séparation de corps ne peut être prononcée que par un juge des affaires familiales, sur requête spécifique. Comme un divorce. Or, je n'ai pas le souvenir qu'un jugement de séparation de corps ait jamais été énoncé en tant que tel (nul avocat et nul notaire n'est intervenu non plus).

Moi et mon mari vivions séparés de faits. Nos biens "propres" étaient répertoriés eut égard à nos régimes de protection respectifs. Je restais cependant propriétaire de l'appartement au même titre que mon mari, et solidaire des charges (bien que je n'ai pas eu les moyens de les assumer).
J'ai été assez énervée, je dois dire, quand le tuteur m'a fait parvenir la "procuration" signée de sa main pour l'assemblée des copropriétaires d'avril 2016, alors que je figurais nommément sur la convocation. De fait, il me contestait donc le statut de propriétaire et me déniait le droit de donner procuration à un tiers. Une absurdité.

Indéniablement, la tutelle de mon mari a été compliquée. Mais en même temps elle a été relativement mal gérée. Doit-on donner une récompense aux gens qui ont accompli plus de choses que ce qu'ils pensaient devoir faire avant de commencer leur labeur, même quand ces derniers ont fait de travers la moitié des choses? Je m'interroge.

Quand j'ai été hospitalisée en clinique "de santé mentale", le 10 mars 2015, mon mari s'est empressé de m'appeler des dizaines de fois rien que les trois premiers jours et il m'a envoyé des SMS presque toutes les heures. J'ai réagis en mettant mon téléphone en mode "silence" et en l'enfermant au fond de mon placard.
Une certaine personne m'a ensuite déclaré que j'avais "torturé mon mari en le laissant sans nouvelles, alors qu'il était inquiet pour moi". Je précise que dans la moitié de ses appels, mon mari me disait que je l'avais abandonné et m'insultait. L'autre moitié du temps, il me suppliait de revenir, sans aucun égard pour le motif de mon hospitalisation, qui était une dépression et un épuisement nerveux.
Bizarrement, la personne qui m'a fait ces reproches a été très écoutée par le mandataire... mais pas moi. Moi on m'a écoutée avec une vague condescendance, comme si j'étais finalement plus à blâmer qu'à écouter de façon impartiale.
 
En conclusion, je considère que le tuteur de mon mari s'est finalement fait avoir par un pervers narcissique. Manipulé, il s'est démené sur des sujets qui ne présentaient aucune priorité et a délaissé des sujets qui auraient du attirer son attention.
De mon point de vue, il a été la victime de la "personne vulnérable" dont il était chargé de "protéger les intérêts", au même titre que j'ai été victime pendant plus de dix ans. Pourtant, a priori, un mandataire judiciaire ne ressemble pas précisément à une "personne vulnérable" si facilement manipulable.

Donc personnellement, je trouve ça assez juste qu'il obtienne de la justice le même type de réponse que moi. Après tout, j'étais l'épouse un peu dérangée qui criait "au loup", non?

Entre un refus de juger quelqu'un et le rejet d'une demande, je ne vois pas une très grande différence.
À part le sens de ce qui est juste.
Ne pas engager de poursuite au pénal contre quelqu'un qui a mal agit sous l'argument que "c'est fini" ça me semble un peu plus injuste que refuser d'accorder une "indemnité exceptionnelle" à un type qui a pas bien géré son taf.

Sinon à part ça?
Ben la succession avance toujours pas.