vendredi 2 septembre 2016

Triste et perdue

Je suis triste et perdue, en ce moment.
J'ai toujours été triste et perdue, dans ma vie. Des fois un peu moins qu'à d'autres moments, mais j'ai quand même l'impression que c'est ce sentiment qui prend le plus de place.

Je ne sais pas qui je suis, pourquoi je suis là, ce que je dois faire, ni où je vais...
Je me suis efforcée d'avancer, depuis toujours, parce que je ne sais pas quoi faire d'autre.
Mais ça fait si mal depuis tellement de temps...

Je ne parle pas de la mort de mon mari, même si ça n'aide bien entendu pas.

Je suis perdue depuis des années. Depuis avant Alain.
En fait, j'évolue depuis toujours dans une sorte de brouillard qui n'a aucun sens.

J'ai 34 ans et j'ai l'impression que je ne serais jamais capable de faire quelque chose de bien de ma vie.
J'ai tellement peu de ne pas "y arriver". J'ai tellement peur de tellement de choses.

Je suis en colère, parce que j'avais l'espoir qu'avec la fin de la maladie d'Alain, avec son décès, je pourrais avancer. Je sais que c'est encore tout récent... mais j'ai l'impression inverse : celle d'être désormais prise au piège dans une mare de bitume en cours de solidification.
Je panique totalement.
J'ai l'impression que je ne pourrais en réalité plus "avancer" dans ma vie avant de longs mois, plus prisonnière que jamais de cette relation.

Aujourd'hui je me suis demandé de drôles de choses...
Je me suis demandé si je n'allais pas retourner vivre à notre appartement, que j'avais quitté parce que la cohabitation avec la maladie d'Alain était devenue insupportable.

Je vis depuis de si longs mois chez les autres, chez mes parents.
Jamais je ne me suis sentie "chez moi", dans cette maison... mais je ne sais plus si je suis chez moi dans notre appartement.

J'ai envie de tout ranger, là bas, de faire le vide, d'arracher l'affreux revêtement de sol du "bureau", de bouger les meubles, de tout réorganiser... j'ai envie d'y ramener le plus gros de mes affaires, de retourner vivre là bas, de rentrer à la maison.

Mais je suis effrayée à cette idée... J'ai peur qu'on me le reproche d'une manière ou d'une autre, alors que je suis pourtant bien chez moi, là bas! J'ai peur qu'on me reproche que c'est trop tôt. Je me dis que l'appartement est en mauvais état, qu'il y a plein de travaux à faire là bas...

Malgré la rénovation des extérieurs, il fait chaud dans cet appartement... la cuisine ne ressemble à rien, non plus que la salle d'eau, dont le bac de douche serait à changer (j'aimerais avoir une baignoire, tant qu'à faire)... l'isolation phonique est désastreuse... mais là où je vis actuellement j'entends la rue, les bus, les voisins...

Je me suis demandé si cet appartement avait vraiment un sens pour moi. Mon opinion sur la question fluctue beaucoup. Parfois je me dis que nous aurions mieux fait de louer quelque chose, au lieu d'acheter... À d'autres moments je me dis que j'ai envie de retrouver un vrai "chez moi", à d'autre je songe à tout faire refaire à neuf et ensuite... acheter autre chose, ailleurs... Ou que je resterais...
Et puis il y a des moments où je ne me dis rien du tout, j'ai juste envie de fuir.

Je suis en colère à cause des histoires de succession.

Alain a toujours voulu que j'ai de l'argent "à moi" et voilà qu'on me dit que mes comptes à la banque sont dans la communauté de bien et que même l'argent que j'ai mis moi-même de coté, en fait, il n'est pas "à moi", mais dans la communauté, et qu'en conséquence, il entrera dans la succession.

Si j'avais su, jamais je n'aurais accepté la suggestion de mon mari de faire transférer mes comptes de ma banque vers la sienne. Et surement pas mon Livret A.

La communauté réduite aux acquêts. Un truc qui ne veut rien dire, finalement, si un compte qui est à mon nom propre est en fait dans la communauté.

Des choses auxquelles je n'ai pas prêté attention pendant mes cours à la fac, trop obsédée par l'angoisse des partiels, terrorisée par les commentaires d'arrêts de tous poils, la jurisprudence et tout ce genre de choses...
Je me sens nulle.

Quatre années d'étude pour un diplôme que je ne sais même pas réclamer, qui n'a aucune valeur qualifiante et qui ne m'aide en rien à affronter la vie.

Je suis en colère et je suis triste.

Je me sens incapable de vivre.
Je ne vois pas ce que je fais là.

Je ne peux même pas aimer quelqu'un sans perdre complètement la boule, sans me sacrifier, m'effacer pour essayer d'être la personne que je crois que l'autre veut que je sois. J'ai toujours été comme ça, aussi loin que je me souvienne. Mais bien sûr, ça occasionne de l'angoisse et de la frustration, parce que personne ne peut vivre comme ça, en s'oubliant lui même...

J'ai aimé Alain comme ça. J'ai sacrifié beaucoup de choses, y compris des choses stupides, comme le fait de ne plus faire de vélo, parce qu'il n'aimait pas ça, parce qu'il n'aimait pas que j'en fasse, parce qu'il était tellement inquiet pour moi qu'il m'empêchait d'en faire...
J'ai passé mon enfance, mon adolescence et une partie de ma vie de jeune adulte sur une bicyclette.

C'est un  détail. Il y a eut tellement de détails.
Seulement, une montagne de détails, ça fait quand même une montagne.

Qui je suis, si je ne peux pas aimer et que je n'arrive pas à avoir une vie, que je ne sais même pas ce que je voudrais dans la vie ?

Je me sens tellement vide.
Vide de sens.

Je commence à comprendre les rapports que j’entretiens avec le monde, la société, les autres êtres humains, mais je ne sais toujours pas qui je suis, ce que je pourrais être ou devenir, quel type d'avenir s'offre à moi, l'intérêt qu'il peut représenter.

Je veux vivre, ça je l'ai déjà.
Je sais que j'ai des tas de passions, mais j'ai du mal à donner une priorité claire à l'une ou l'autre.

L'école me manque, même si je détestais ça...
Le coté institutionnel, qui fait qu'on fait tel truc le lundi, tel truc le mardi, etc. C'est ça qui me manque. Que ma vie soit régie par des rythmes qui m'impulsent.
La clinique me manque.
Le monastère, peut être, même...
Mais je sais très bien que je ne suis pas faite pour ce genre de vie là.

J'ai besoin de plus de choses dans ma vie, mais je ne sais pas lesquelles...

Je suis terrorisée par ma vie actuelle parce qu'elle n'a pas ce sens donné par des choses qui me sont extérieures.

J'arrive à retrouver un certain entrain avec la salle de sport, mais de manière très minime.
En même temps je suis terrorisée par l'idée de devoir faire des choses de manière régulière.

Je suis actuellement dans un état tel que je serais incapable de retravailler comme je l'ai fais, que ce soit en intérim ou dans le secteur de l'aide aux personnes.
Quoique quelques services rendus ces derniers mois me font dire que je serais peut être une bonne coursière ou livreuse...?

La plupart des autres activités qui me viennent à l'esprit me semblent tout de même inenvisageables...
Je me sens simplement "bonne à rien". Incapable de travailler en équipe, fort peu capable d'interagir avec d'autres personnes, de "m'imposer", ayant besoin de consignes écrites pour être efficace, ainsi que de comprendre parfaitement les tenant et aboutissants de ma tâche (et si elle me semble dépourvue de sens, ou incompatible avec la "bonne santé générale", j'aurais du mal à la faire correctement).

À partir de là, je ne vois pas ce que je pourrais bien faire de ma vie.

Je me sens fatiguée et malade.
Malade de ne pas comprendre, de ne pas savoir, de ne pas "y arriver".

J'ai envie de changement.
Mais je ne sais pas comment l'impulser.

En rentrant chez moi ?
Est-ce bien "chez moi" ?
Ce "chez moi" me semble bien loin du centre de mes intérêts actuels, c'est à dire de ma salle de sport... et pourtant c'est tout près ! Quelques minutes en voiture ou en vélo (mais dur dur, la remontée, à vélo...).
C'est chez moi, après tout...

On dit parfois "Un petit chez soi  vaut mieux qu'un grand chez les autres".
Je commence à ressentir profondément le sens de ces mots... même si mon chez moi me semble un peu étranger... Il est entouré de choses qui m'apparaissent aujourd'hui hostiles, comme tous les lycéens qui vont et qui viennent, les voisins de paliers et d'immeuble, la circulation dense, le parking pas privatif...

Je crève de trouille, décidément.
Vraiment très triste et perdue.

Je voudrais une petit chez moi qui soit vraiment seulement à moi... ailleurs.


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