Affichage des articles dont le libellé est Subjectivité. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Subjectivité. Afficher tous les articles

jeudi 25 janvier 2024

Incompatibilité humaine

La vie est faite de rencontres.
Dans des circonstances particulières.
Avec une grande diversité de personnes.

Chaque individu est différent et riche de ses expériences.
Chaque être humain contient en lui un cocktail unique de ressentis, d'émotions.
Nous abordons tous la vie à travers un prisme, que dis-je, un kaléidoscope qui nous est absolument propre.
Ce qui se trouve devant la lentille, reflété par les miroirs de notre conscience, ce sont nos joies, nos peines, nos douleurs, nos espoirs, nos blessures, nos efforts, nos réussites, nos échecs, la façon dont nous avons géré tout ça, ce passé, ces avenirs... bref c'est unique.
Au cours de notre existence il est rare qu’on éprouve toutes les émotions possibles.
Chaque individu ne vit que ce qu’il expérimente.
Dans mon kaléidoscope, qui n'est autre que mon profil émotionnel, il y a des milliers d'expériences, parfois légères, parfois pesantes, mais dont chacune a son importance.
Certes les quelques 21.856.200 minutes de mon existence n'ont pas toutes été d'une importance cruciale.
Si on se rapporte en heures, cela fait quand même 364.270 heures. Si j'ôte à la louche environ 8h de sommeil par nuit, il me reste encore plus de 240.418 heures d'état de conscience qui ont influé sur mon profil émotionnel.

Pourquoi ces savants calculs?
Parce que ces deux cent quarante mille quatre cent et des brouettes moments ont fait de moi celle que je suis en cet instant 'T" où j'écris.

Je ne suis plus la même que celle que j'étais quand j'ai commencé à écrire ce blog. J'ai changé, au fil des expériences, des émotions, de mes lectures, de mes échanges...

Au cours de ma vie, j'ai eu quelques amitiés. Rares sont celles qui ont perduré.
J'ai du mal à nouer des liens, ainsi qu'à faire confiance.

Mes amitiés sincères, je les ai découvertes ces dernières années.
Auparavant, je connaissais davantage le copinage, c'est à dire des relations superficielles dans lesquelles je jouais un rôle social qui ne correspondait pas à ma personnalité réelle et sincère. Non dans un but de faire semblant, mais par peur du rejet. Je n'avais même pas conscience de me dissimuler ainsi.

Depuis quelques années, j'ai compris qu'avoir des relations sociales saines, basée sur une honnêteté et un respect réciproque est bien plus important pour moi que d'avoir des relations sociales tout court.

C'est ainsi qu'en 2019 un ami m'a affirmé une chose sur ma personnalité, à laquelle je n'ai pas voulu croire. Il m'a dit que j'avais du charisme. Plaît-il? Tu parle de moi, là, t'es sûr? Non parce que... hem... Mais portnawak!

Je n'y croyais pas une seconde. Moi, charismatique? Pfff!
Le charisme est la qualité d'une personne (ou d'un groupe) qui séduit, influence, voire fascine les autres par ses discours, ses attitudes, son tempérament, ses actions.

Cet ami, aujourd'hui décédé, avait lui un véritable charisme à mes yeux.

Par contre sa compagne, bien que j'ai fais des efforts, m'épuisait. J'avais de la sympathie pour elle, mais sa façon de parler, ses attitudes, et sa façon d'être globale, quelque chose d'indéfinissable en soit, me rendait pénibles les moments passés seule à seule avec elle. Je culpabilisais beaucoup de cet état de fait émotionnel, que je jugeais négativement.

Peu à peu, j'ai réalisé que c'était cette qualité spécifique qui m'attire chez les gens et m'en rapproche.
Toutefois un trait de personnalité ne fait pas toute une identité. D'autres éléments sont importants dans mon cœur, comme l'ouverture d'esprit et sans doute des milliers de choses dont je n'ai absolument pas conscience.

Pour moi, l'amitié, c'est partager une relation d'affection mutuelle avec quelqu'un avec qui on se sent libre d'être soi-même, sans fards ni faux semblants, sans être jugé, en toute bienveillance. On peut être en désaccord, ne pas partager les mêmes gouts, les mêmes opinions, mais on sait que l'autre nous respecte en dépit de nos différences. On sait aussi que le dialogue est possible, sans que les passions se déchaînent et mènent au conflit.

Ces trois dernières années, j'ai été en relation avec une personne que j'ai considérée comme une amie.
Je me sentais libre d'être moi même, sans fards ni faux semblants. J'avais le sentiment que nous avions beaucoup en commun.
Cette personne est indéniablement charismatique. Elle a un tempérament fort qui attire l'attention, une présence qui ne laisse pas indifférent. Sur certains sujets spécifiques, elle a un savoir encyclopédique.

Nous nous sommes fréquentées assidument puis un déménagement a mit de la distance entre nous.
Chaque fois que nous nous voyions, je me retrouvais épuisée nerveusement et j'avais l'impression que je me surinvestissais à cause de mon envie de passer du temps avec cette personne.
Puis un autre déménagement nous a rapprochés.
En quelques semaines, j'ai commencé à réaliser que, bien que j'apprécie, respecte et souhaite le meilleur à cette personne, envers qui j'ai une sorte de fascination, quelque chose d'indéfinissable nous séparait.

Peu à peu, j'ai réaliser que fréquenter cette personne était par moment une corvée, que je cherchais à éviter. Je l'ai très mal vécu, car enfin! nous étions amis! Pourquoi ce besoin de distance?

Puis, cette personne a commencé à me demander de modifier mes comportements en sa présence.
D'abord, il a s'agit de ne plus évoquer de sujets négatifs, de me montrer plus "positive".
Pardon? Je suis "négative"? À quels moments? Je ne partageais pas ce sentiment.
Il est vrai que je souffre de troubles anxieux et d'un syndrome fibromyalgique, et très probablement aussi du très génial syndrome de l'intestin irritable. Je n'avais vraiment pas l'impression de passer mon temps à m'en plaindre. En revanche, quand j'ai mal, je ne vois pas pourquoi je le cacherais. Pour moi, rien à voir avec une plainte ni quelque chose de "négatif". J'énonce un fait, qui existe.
Apparemment, je le faisais trop. Ha. Bon. D'accord. Le truc, c'est que c'est un trait de personnalité, pas forcément un choix délibéré. Ne pas le faire, ça c'est un choix délibéré, et ça me demande des efforts importants, qui me plombent considérablement le moral (et donc ça a un impact négatif).

Toutefois, je crois que c'est un point de détail...

Il faut savoir que je suis limitée dans plein de choses.
Les troubles anxieux et la fibromyalgie drainent mon énergie.
Je dispose d'une sorte de jauge pour la journée et pour la semaine et dois veiller à utiliser mes forces avec parcimonie, en respectant mes limites.
Normalement, je connais bien mes limites.
Toutefois, très, très souvent, auprès de cette personne, j'ai dû partir précocement, me reposer ou subir des crises d'angoisse, frappée violemment par une dépassement inattendu desdites limites!

Je ne comprenais pas, comme souvent quand je ne veux pas accepter certaines choses.

J'ai persisté à refuser de regarder la réalité en face, jusqu'à ce que cette personne revienne vivre plus près de chez moi... Au début, j'étais très heureuse, mais j'ai déchanté. J'ai commencé à me sentir très mal, psychologiquement et physiquement. C'est seulement là, la semaine dernière, que j'ai regardé les choses en face.

Cette réalité, qui est la mienne, et dont personne n'est responsable, c'est que quand je passais du temps avec cette personne, même par messages instantanés, ça me pompait littéralement mon énergie.

On a tous entendu parler de "vampires énergétiques".
Ce terme désigne une personne qui draine l'énergie mentale et émotionnelle des autres. Elle "profite" de leur sens de l'écoute et de leur empathie pour satisfaire ses propres besoins, et n'offre pas son soutien en retour. Je pense cependant que nous sommes tous le vampire potentiel d'une autre personne.

Toujours est-il que c'est un phénomène qui est très difficile à accepter quand il se produit avec une personne qu'on apprécie. Pourtant, c'est important d'en prendre conscience.

J'ai pris conscience du problème lorsque cette personne s'est mise à me reprocher d'avoir sollicité un service à un ami commun, de lui avoir proposé un café... certes, c'étaient des moments qui nous étaient communs. Toutefois, les reproches qui s'en sont suivis étaient disproportionnés, à mes yeux, par rapport aux incidents de communication...

J'ai été inondée de messages visant à me faire prendre conscience que je n'aurais pas été franche, que j'aurais caché mes intentions véritables, que j'aurais cherché ceci, ou cela, que je serais trop centrée sur le négatif, que je ne tiendrais pas compte des émotions des autres... J'ai eu à faire face à une véritable avalanche de messages... mes réponses ont été accueillies avec mépris. Un langage trop soutenu, des messages trop longs, trop fatiguant à lire... J'ai essayé de prendre du recul. Pas facile, quand l'affectif entre en jeu.

Peu à peu, j'ai regardé le problème en face: ce ne sont pas les faits le problème.
Le problème, c'est la relation elle même.

Même si une personne m'intéresse, que j'ai envie de passer du temps avec elle, de la fréquenter... si je me rend compte que cette relation m'épuise, peut être mieux vaut-il que j'y mette fin.

J'aurais envie de continuer à être présente... mais je constate que c'est impossible.
Mes tentatives de... de quoi, d'ailleurs? Je ne sais plus trop.
Serait-ce pour avoir le dernier mot... Non: j'ouvre mon PC, constate qu'il y a un message qui avance que, ne m'étant jamais "sentie écoutée" par cette personne (comprise, en réalité), la conclusion était que nous n'aurions jamais étés amis...
J'ai eu l'idée idiote de répondre.
Une réponse courte.
Suivie de la sienne.
Il y était pointé une sorte de manque de respect de de ma part d'une spécificité de cette personne.
Pas du tout: j'avais toujours supposé qu'elle bénéficiait d'une application l'aidant avec ça...
J'ai fais une réponse courte, sans affect, suggérant une telle appli.
Réaction longue et agressive.
Alors oui, peut être que je voulais avoir le dernier mot, face à ce rejet de principe.
Le dernier message a été de trop, je pense... À "Arrête de m'envoyer des messages!", je me suis permis d'envoyer "Arrête de me répondre."

Cependant, je souligne que la conclusion de cette personne, qui tendrait vers le fait que nous n'ayons jamais étés liées par de l'amitié, est à mon sens extrême: entre être amis et se détester rageusement, voire être indifférents l'un à l'autre, il y a une multitude d'émotions diverses. L'indifférence étant un sentiment d'une personne qui ne se sent pas concernée ou touchée, qui n'accorde aucun intérêt, aucune attention à quelqu'un ou quelque chose.

Cette personne ne m'est et ne me sera probablement jamais indifférente.
Pour l'instant je suis soulagée, frustrée, un peu rageuse face à un refus d'écoute, mais en même temps touchée et triste parce qu'elle est blessée, et je ne lui veux aucun mal.
Je ne suis absolument pas indifférente.

Tous les humains ne sont pas compatibles entre eux.

En tant qu'individus, nous cohabiterons, car nous partageons des affinités communes et fréquentons des lieux en commun. Nous nous croiserons donc forcément. Cela rend certainement les choses plus difficiles, pour tout le monde, y compris les gens qui gravitent autour de nous.

Ainsi va la vie.

jeudi 17 décembre 2020

Une sexualié précoce n'a rien à voir avec la pédophilie

ATTENTION CONTENU RELATIF À MA SEXUALITÉ
(et divers problèmes de santé physique et psychique)
 
 
Je ne me souviens plus à quel âge j'ai commencé à être intéressée par la sexualité.
Ça a été très précoce chez moi, et cela a prit diverses formes successives, que je ne renie pas. Certaines font encore partie de moi, tandis que d'autres se sont atténuées, estompées, voire se sont mises à me faire horreur et je les ai expurgées du mieux que possible de mon univers intérieur..

La sexualité est très exposée, de nos jours. Partout, à outrance. Souvent sous couvert d'information, les médias versent dans une quête de sensationnalisme en la matière. Qu'il s'agisse d'évoquer certaines pratiques spécifiques rendant bien heureux leurs pratiquants, qui ne font de mal à personne (du moment que tout le monde est consentant) ou de médiatiser des dérives, drames ou autres histoires de vie gâchées, bouleversées, saccagées.
On médiatise la sexualité des adultes... mais on explique très peu celle des enfants. Sans doute pour ne pas prendre le risque d'être accusé de pédophilie et autres crimes.
 
Toutefois il faut savoir que la sexualité de l'enfant existe et est étudiée depuis des décennies par les pédopsychiatres. Dans ses aspects "normaux" ou pathologiques.
 
"L’enfant en âge d’aller à l’école primaire – entre 6 et 11 ans environ – est habité et mû, entre autres, par sa pulsion et ses désirs sexuels. C’est une énergie vitale en lui qui vise aussi bien à l’union positive avec l’autre qu’à une union positive à lui-même.[...] elle engage plus ou moins concrètement le corps et les parties sexuées de celui-ci, et apporte à l’enfant – et à ses éventuels partenaires – plaisirs et joies. Il y a donc réellement une vie sexuelle à cette période de la vie, faite de représentations mentales, d’affects, mais aussi de mises en pratique. Elle peut être momentanément estimée soit « normale », soit pathologique."
 
Il est important pour moi de poser cela en préambule, car je vais parler de moi et de ma sexualité, très précoce, et complexe. Je ne la renierais jamais. Elle fait partie de moi.

Comme chaque être humain, j'ai une histoire de vie. C'est la mienne, elle m'appartient.
J'ai longtemps été très mal dans ma peau, honteuse, me sentant "anormale", me jugeant "perverse" et ne méritant pas vraiment d'avoir une vie épanouie. Pas uniquement en raison de mon monde érotique intérieur, mais aussi en raison de mes grandes difficultés à aller vers les autres.
Mon histoire de vie n'est pas linéaire, elle est faite d'éléments intrinsèques et de pièces rapportées, d'événements positifs ou négatifs.
De manière certaine, aujourd'hui je ne suis pas la même qu'il y a un an, tout en étant la même.
De manière toute aussi certaines, aujourd'hui, je ne suis pas la même que celle que j'étais à 20 ou 22 ans.

De manière encore plus certaine et indubitable, je suis aujourd'hui une adulte, mais j'ai été une enfant.

Or, enfant, j'avais un monde imaginaire très dense, où l'érotisme et la sexualité étaient présents.

Mon premier souvenir clairement érotique remonte à une scène du mythique film "Il était une fois en Amérique" de Sergio Leone. Scène vue, je le précise immédiatement, à l'insu de mes parents.
 
Pour rappel il s'agit tout de même de l'histoire d'un gang de New York, dont les protagonistes, d'abord enfants, puis évoluant en âge, grimpent les échelons du banditisme: meurtres, viols, braquages et autres actes répréhensibles y sont donc récurrents.
Il est évident que mes parents ne m'auraient jamais laissé en regarder un morceau, et ça n'a d'ailleurs pas été le cas: j'avais du mal à dormir, et ce d'autant plus que j'avais senti cette étrange ambiance d'interdit, quand on nous avait envoyées nous coucher ma sœur et moi. Alors, quand je m'étais relevée, c'était en catimini et en rasant les murs, que je m'étais faufilée dans le couloir de l'entrée et que j'avais regardé le petit écran, fascinée par ce mystère des films "pas de notre âge". J'avais alors contemplé la solution pour "faire taire" une secrétaire par quelques gangsters... La dame poussée contre un bureau et visiblement troussée plus ou moins contre sa volonté par l'un des membres de la bande.

Un peu plus loin dans le film, la dame "joue" à identifier l'auteur de son troussage.


Je n'avais pas été choquée par cette scène, mais bien plutôt émoustillée. J'en conserve un souvenir fort et... très fortement idéalisé. Aujourd'hui, je n'éprouve aucune honte à avouer cela. Je ne vois absolument pas pourquoi je devrais l'être.
 
J'ai revu le film, dans son intégralité, l'an passé, en constatant que mon souvenir est vraiment plus intéressant que la réalité. Cette dichotomie entre le réel et le souvenir est intéressante, en soit. Pour moi elle est le signe de ce que peut être le monde intérieur de tout-un-chacun: la mémoire des émotions déforme les choses, en laisse une trace parfois très surfaite.

Ce qui ne s'est ni estompé ni effacé de ma mémoire, c'est ce sentiment fort, alors que j'étais tapie dans l'ombre du couloir, en train de regarder ce bref passage, de commettre une transgression. Une émotion qui a sans doute donné son "sel" à mes sensations.

À ce stade, je me dois de donner quelques importantes précisions:
 
J'ai l’immense chance (selon moi, et c'est bien entendu un point de vue personnel) d'avoir grandis dans un foyer où la nudité n'était pas un tabou ni quelque chose d'anormal. Toute la famille se changeait dans la salle de bain, en même temps ou dans un laps de temps rapproché. Nous étions régulièrement nus les uns avec les autres, sans que cela ne nous choque ou nous semble "anormal" en quoi que ce soit. Ni les uns ni les autres n'avions de vision sexualisée de nos corps dénudés.
 
De même que l'été, dans notre petite piscine de jardin, nous nous baignions nues, ma sœur et moi, et il ne nous serait jamais venu à l'idée que cela pouvait être choquant, indécent, incorrect ou immoral... et encore moins que cela aurait pu avoir trait à une forme de sexualité.
Que ce soit dans le jardin, la salle de bain, notre chambre d'enfants ou en train de courir dans le couloir, la nudité était juste un état "non habillé", réservé toutefois à la sphère privée.
Ni plus, ni moins.

J'ai vus mes parents et ma sœur nus, ainsi que certains camarades (amis d'enfance, camarades d'école), et je ne ressentais rien de sexuel ou d'émoustillant dans ces situations. Je n'étais pas pudique, au sens que ma propre nudité ne me met pas mal à l'aise), et cependant je respectais la pudeur des autres, qu'il s'agisse de ceux qui ne souhaitaient pas me voir nue ou de ceux qui ne souhaitaient pas l'être devant moi. Je ne cherchais pas à espionner les autres, qu'ils soient enfants ou adultes.

Selon ma conception des choses (contemporaine à cet écrit), la nudité en soi n'est pas sexuelle ou sexualisée: c'est simplement l'état naturel de l'être humain, qui nait ainsi, sans vêtements ni cache sexe naturel.
Certaines personnes sont à l'aise dans leur corps et se sentent bien nus, d'autres n'ont pas ce même ressenti. Que ce soit l'une ou l'autre de ces deux attitudes, il n'y en pas une qui soit "bonne" ou "mauvaise" universellement. Il s'agit bien davantage de traditions et de codes sociaux que de nature, de "bien" ou de "mal".
Le fait est que nous vivons malheureusement dans une période trop fortement sexualisée, dans laquelle circulent de très nombreux préjugés de nature à brouiller les signaux (propice, par exemple à une  confusion entre naturisme et exhibitionnisme).
 
Malheureusement le regard des uns sur la nudité des autres reste le critère pour les premiers de décider si cette nudité est "normale" ou pas, mais aussi de ce qui est permis ou pas. Dès lors ma propre considération de ma nudité ou de ma pudeur, importe peu. Quel que soit mon ressenti ou mon intention, c'est l'interprétation de l'autre qui primera.
Quelle injustice!
 
Non seulement j'ai vu mes parents (et d'autres personnes, sur des plages, par exemple) nus, mais qui plus est, j'ai grandi dans une famille où il y avait une grande prévention sur le thème "ton corps est à toi". Très tôt, nous avons assimilé qu'aucun individu (que ce soit un adulte ou un enfant de notre classe d'âge) n'avait le droit de nous toucher, de nous tenir des propos nous mettant mal à l'aise ou avoir tout type de comportements au travers desquels nous ne nous sentions pas respectés.
 
Ma sœur et moi avons été éduquées afin de comprendre ce qu'est la pudeur (la notre aussi bien que celle des autres), de même que nous avons bénéficié d'une éducation sexuelle adaptée à nos âges, expliquant le corps, son développement, la puberté, etc.
Je n'ai jamais été choquée de cette éducation à la sexualité et au contraire je suis heureuse de ces préventions bienveillantes de la part de mes parents. Il est d'ailleurs prouvé qu'une éducation sexuelle complète protège les enfants et contribue à rendre la société plus sûre et inclusive (voir site du Conseil de l'Europe)
 
Si j'ai, malheureusement, été victime d'abus au cours de ma vie, cela a été rendu possible principalement par des états de confusion affective, ayant tendance à faire fusionner "désir" et "confiance" (voire "redevabilité et autres sentiments), et non pas par une méconnaissance des corps et de la sexualité. La flatterie, les encouragements à "devenir grande", un manque de confiance en soi qui pousse à prendre des risques pour essayer de "faire illusion", ou encore les risques inhérents à un état de dépendance affective sont des aspects de la vie sur lesquels je n'avais pas été accompagnée ou suffisamment éduquée. Je crains d'ailleurs que ces aspects restent encore largement sous traités actuellement.

J'ai donc reçu une éducation sexuelle théorique, adaptée à mon âge.
J'ai connus des émois.

J'avais des fantasmes, également.
En fait mon imaginaire a été très largement tourné vers la sexualité, et ce de façon très précoce.
Est-ce cela qui explique que j'étais mal à l'aise avec mes pairs, ceux de mon âge, qui s'amusaient de jeux dans lesquels je ne trouvais pas d'intérêt? Peut être, je n'en sais rien.
Mes souvenirs sont flous, lointains.
J'en ai des réminiscences.
 
Je n'ai pas le souvenir de fantasmes très structurés, mais je me souviens avoir toujours été attirée par les garçons que j'estimais matures sexuellement. C'est à dire que les enfants de mon âge ou à peine pubères ne me faisaient pas rêver.
 
Très tôt, grâce à l'éducation de mes parents, j'ai compris que le regard des autres sur ma  sexualité était le critère pour ces autres de décider si cet aspects de mon existence était normal. J'avais par ailleurs la conviction que ce que je rêvais, ce que je fantasmais, serait forcément mal vu.
Je ne voulais pas être punie ou maltraitée par mes parents ou ma famille, pour des pensées, des idées qui, malgré tout, me faisaient du bien. Je ne voulais pas risquer d'être jugée et d'être encore plus être mise à l'écart par mes camarades d'école pour des histoires qui ne vivaient que dans mon esprit. Par ailleurs, je ne voulais pas non plus que ça se sache, parce que j'avais conscience que ma mère, institutrice, était déjà bien trop rejetée par les parents d'élèves pour qu'on lui reproche cela.

À huit ans, j'avais déjà le poids du secret qui plombait mon existence. Cela a renforcé mon sentiment de différence, de marginalité. Un état de fait lié à des "bizarreries" trop visibles.
La première d'entre elles étant que j'étais l'une des filles de l'institutrice.
La seconde était que... et bien j'étais vraiment bizarre, que je "collais" ma sœur et était incapable de véritablement m'amuser avec les autres. Sans compter que j'étais la "malade imaginaire" de service.

Dès l'école maternelle, j'ai commencé à  souffrir de diverses manifestations physiques de troubles anxieux. Toutefois, des "simples" maux de ventre (très douloureux) et céphalées chroniques rencontrées, les premières années, j'ai commencé à souffrir également de troubles mictionnels (incapacité à sentir quand j'avais besoin d'uriner, ou incapacité d'émettre le jet alors que j'en avais besoin). J'ai également souffert de paresthésies des membres inférieurs, attribuées à la croissance par le médecin de famille (qui étaient si douloureuses, que j'étais incapable de marcher sans appuis), et j'en passe. Bref, j'étais en souffrance physique, et ça ne s'est jamais arrêté depuis.

Ces troubles ont un lien avec ma sexualité infantile. En effet beaucoup de petites filles se touchent parce que ça leur fait du bien. C'est naturel et je trouve que c'est très bien qu'elles soient les premières à connaître leur corps.
Moi je me touchais parce-que ça calmait mes douleurs urinaires, au niveau du méat urinaire. C'était un geste que j'avais conscience de ne pas pouvoir faire en public, et dont j'avais très profondément honte. Et pour cause : lorsque je n'arrivais pas à uriner, alors que je sentais ma vessie me déchirer le ventre, je rentrais les doigts pour faire pression sur la paroi interne du vagin, contre celle de la vessie, afin de stimuler la miction.
Je n'en ai jamais parlé à mes parents. Je ne me souviens pas pourquoi, mais je pense que j'avais honte.
Pendant des années n'ai pas eu de mictions normales (avec simple relâchement des muscles pelviens, au lieu de pousser pour expulser l'urine.
 
J'ai aussi découvert le plaisir anal à durant cette période là, et comme les encyclopédies illustrées et les livres d'éducation sexuelle pour enfants n'en parlaient pas, j'en éprouvais vraiment une très grande honte. J'aimais me toucher, mais c'était plutôt de l'ordre compulsif: lorsque ça me "prenait", j'en avais terriblement envie, et je devais passer à l'acte, mais avec un grand sentiment de honte, et je finissais toujours très frustrée, sans compter la panique totale que j'éprouvais à l'idée d'être surprise.
 
Je ne raconte pas ça pour choquer.
Ça n'est pas pour rien que j'ai inclus un avertissement en en-tête.
Tous ces trucs sont assez trashs, et globalement, j'avoue que c'est plus facile de ne pas les évoquer.
 
Bizarrement cependant, ça me fait un bien fou de les écrire. Une catharsis salvatrice.
J'ai vécu un certain nombre de choses de façon très négative et honteuse. Pour autant, je n'ai pas le sentiment d'avoir jamais été victime de qui que ce soit dans mon enfance. Toutes les émotions négatives que j'ai éprouvées face à ma sexualité naissante, c'est mon propre esprit qui les a générées.
 
Pourtant les enfants sont bêtes et s'amusent parfois de choses très cruelles qu'ils font subir à leurs camarades. Or j'étais la "pisseuse" de l'école, puisque j'avais ces problèmes de troubles de la miction. 
Pour être toute à fait claire, je sentais le pipi.
On se moquait de moi à cause de ça, et moi je ne voulais pas aller me plaindre à mon institutrice, pour diverses raisons.
Un jour, après la fin de la classe, on traînait derrière l'école avec d'autres gamins, et le berger allemand du coin est venu me renifler l'entrejambe de façon insistante. Alors un des gamins m'a dit en riant de pencher en avant, ou de me mettre à quatre pattes, et je l'ai fais. J'étais habillée et je n'ai pas compris ce qui se passait sur le coup. Il m'a fallut des années pour assimiler la vue grivoise et inconvenante qu'ils avaient pu avoir ce jour là.
Je n'en suis pas traumatisée. Je ne me suis jamais sentie "salie" par ce jeu idiot. Je ne suis pas en colère. Je me sens simplement attristée, peut-être: ces enfants là, eux, ne savaient pas ce qu'était le respect des autres et de soi. J'espère que les adultes qu'ils sont devenus l'ont apprit.
 
Dans cette école, que j'ai fréquenté de mes 6 ans à mes 8 ans (soit trois ans), j'ai eu divers émois "érotiques". Mais c'était une sorte d'attirance, sans fantasmagorie associée (je ne m'imaginais pas en train de faire des choses avec l'objet de mon désir). J'étais attirée par les garçons qui n'étaient plus à l'école primaire, comme mes camarades et moi même, et de préférence ceux dont la voix avait mué.

Je n'étais pas une petite fille soignée. Je n'affectionnais pas les jupes et robes, ne tenais pas à être mignonne ou élégante. Je traînais en survêtement environ 350 jours par an.

J'étais très curieuse, à plein de points de vue, cependant la sexualité, était un de mes sujets "d'étude" de prédilection. Je savais déjà comment on faisait les bébés. J'avais conscience que mon corps et celui de ma maman ne ressemblaient pas aux planches anatomiques des dictionnaires encyclopédique. Je n'ai jamais vu ou cherché à voir des adultes dans leurs ébats sexuels, toutefois enfant des années 80, je voyais des femmes à demi nues se trémousser dans "Palace", et d'autres émissions laissaient comprendre ce qu'était la sexualité et l'aspect lié au plaisir bien plus qu'à la procréation.
Par ailleurs, je dois avouer que je me sentais "mûre". Or la sexualité (et ce qui y avait trait) semblait être réservé aux adultes, que j'enviais profondément. Cet aspect était un fort moteur.

Mais par dessus tout, j'aimais fantasmer et me sentir excitée. Je n'avais pas de camarades de mon âge avec qui j'aurais pu partager ces idées. J'ai bien essayé, maladroitement, mais cela s'est soldé par un échec et mon petit camarade (qui du reste n'était pas dans la même école primaire que moi) n'avais plus voulu me voir pendant un long moment après ça. Je n'avais donc pas de possibilités de partager mes impressions, ni de découvrir les autres via des jeux plus ou moins innocents (mais très très curieux) et je n'avais guère de satisfaction à me toucher moi même.
Alors je me suis mise à rêver, intensément.
Puisque les enfants de mon âge ne semblaient pas intéressés (et ne m'intéressaient pas, du reste), mes pensées se sont tournées vers des "grands".

J'ai continué à grandir, mon environnement social a peu évolué (j'ai changé d'école, mais avec de grosses difficultés à créer du lien social).

J'ai le souvenir d'avoir, un soir, joué à une version de "cap ou pas cap" (de montrer ton zizi) avec deux ou trois autres enfants. Nous avions 9 ou 10 ans. Je n'ai jamais considéré que ce jeu avait quoi que ce soit de sexuel. Les autres étaient dans la transgression de la nudité génitale... moi je ne faisais que participer à l'un des rares jeux où on m'acceptait.
 
J'avais mis la main sur des bandes dessinées satiriques et de caricatures, où le sexe ou la sexualité étaient parodiés ou tournés en dérision. Les œuvres de Jean-Marc Reiser m'ont profondément marquée, mais aussi certains volumes des "Passagers du vent" de François Bourgeon (comportant des dessins très explicites et réalistes). J'en alimentais mes fantasmes et mon imaginaire érotique, ainsi que mes notes intérieures sur les meilleures façons de donner du plaisir à mes futurs et hypothétiques partenaires.
J'ai aussi le souvenir des premières fois où j'ai vu les films "Angélique". Ha! Angélique, fille du baron de Sancé de Monteloup, élevée très librement et incarnée par Michèle Mercier. Il me semble que c'est à cette période que j'ai commencé à développer un gout prononcé pour la contention érotique (liens, menottes, bondage, shibari...), mais je ne pourrais pas le jurer.
Tout ça est très lointain et je ne sais plus au juste comment tout a évolué.

Quand je suis rentrée au collège, à 11ans, j'avais envie d'être une femme, mais je restais une simple préado, n'osant pas aller vers les autres, effrayée par la nouveauté, moquée par ses condisciples et s'évadant en pensées dans des scenarii d'enlèvements où je serais devenue l'esclave sexuelle tantôt de chasseurs concupiscents, tantôt d'une secte new age. Ou alors je m'imaginais séduite par un beau brun aux yeux verts, qui m'emmènerait dans sa voiture pour m'initier comme une vraie femme.
Mais je n'avais que 11 ans, et ma poitrine commençait à peine à pointer.

J'avais des désirs, que j'orientais sur les élèves de 3ème, qui ne m'accordaient bien entendu pas un regard, si ce n'était pour se moquer des "bleus" de 6ème.

Je ne me souviens plus comment j'en suis arrivée là, mais j'ai voulu "sortir" avec un garçon, mais au lieu que cela se fasse dans la tendresse et les mots doux (ce que je suppose être une relation "normale" au collège), je me suis retrouvée avec un élève multi-redoublant, en train de plonger sa main dans mon pantalon devant les autres garçons de la classe. J'avais 12 ou 13 ans, et j'étais malheureuse.
J'alternais les fantasmes sexuels avec la bouffe et les mille et une façons de me suicider tout en pourrissant bien la vie des autres (genre s'ouvrir les veines dans les toilettes, en répandant bien mon sang partout). Je ne comprenais pas le sens de ma vie. Je savais que mes camarades de classe ne m'aimaient pas, et c'était réciproque, je haïssais le collège, les profs, les emplois du temps que j'étais incapable d'assimiler.
 
Quand je rentrais du collège, je voulais me vider la tête. Un jour, j'ai découvert le Minitel rose. Des récits érotiques, et puis des serveurs de discussion. Je me faisais passer pour majeure, mais quand on me demandais de façon directe "est-ce que tu suces", j'étais finalement choquée.

À 13 ans, je me suis laissée embarquer à faire des "conneries" (sécher les heures d'étude!) avec un petit groupe d'élèves (qui aimaient surtout mon argent de poche) et une de ces camarades m'a entraînée à fréquenter un mec de 17ans. J'étais vierge et, comme dans certains films pour midinettes, je voulais "le faire". Mais à part me rouler des pelles pendant plus d'une heure et mettre sa main dans ma culotte (sans que je ne ressente quoi que ce soit, d'ailleurs), il ne s'est rien passé avec lui.

De dépit, l'été qui a suivi, celui de mes 14 ans, aux environs du 15 aout j'ai fais du rentre-dedans à un groupe de potes de 22-23 ans. Ma "première" s'est finalement faite sur le siège passager d'une Super 5. Pas le coup du siècle et le dialogue qui a suivit, qui me fait qui plus est rire depuis deux décennies : "Tu as joui?"..."Heu... je sais pas"..."Tu as pas ressenti une chaleur dans ton ventre?". Mon gars, je te pardonne, mais mes orgasmes ne me font pas vraiment cet effet là. Mais tu as fais preuve de bonne volonté, quand même.

Pendant un an, rien. Enfin si: des envies, des fantasmes, des histoires un peu barbares dont je n'ai pas envie de parler, des envies de rencontrer des hommes vraiment mûrs, de 35 ou 40 ans. Des fantasmes de soumission, dans lesquelles je n'aurais pas eu à prendre la moindre initiative. Sans violences, mais avec une sorte d'abandon déculpabilisant.

Et puis à 15 ans, aux alentours du 15 aout, j'ai rencontré mon premier "vrai" copain. Il avait 25 ans. Enfin... "vrai", c'est vite dit. On est jamais "sortit" ensemble, sauf une fois au cinéma. Le reste du temps, on couchait ensemble et je mettais en pratique toutes les connaissances théoriques que j'avais accumulées depuis des années.

En parallèle, je restais taraudée par des fantasmes pas du tout avouables, et je le vivais très, très mal.
J'étais obsédée par des histoires de harem, de contraintes et autres, et ne maîtrisais rien. Je jouais avec divers objets de formes oblongue, était frustrée, me détestais, me maudissais et me jurais de ne plus me laisser appeler par ces pratiques, mais immanquablement je recommençais.

Mon année de 3ème s'est déroulée dans un grand isolement social, sans amis. Je passais les "récréations" dans un coin, sur les marches du gymnase, enfermée dans les WC ou en salle d'autodiscipline pour avoir la paix, ne pas devoir subir les autres, qui semblaient ne me remarquer que pour me balancer des vacheries. Je n'allais même plus déjeuner au self, pour ne pas faire la queue, ne pas devoir chercher une place où m'assoir, vu que personne ne voulait de moi. Alors à 17h30, je rentrais chez moi affamée et avec l'envie profonde de m'évader, de dissoudre ma conscience de ma médiocrité et de mes infâmes obsessions sexuelles dans des séries qui annihileraient tout mon être.

Au lycée, à l'internat, le fait que je dessine beaucoup de femmes nues a fait se propager la rumeur que j'étais lesbienne. Pas faux. Pas vrai. J'aime les hommes et les femmes. Mais de toute façon, je m'en fichais. Le weekend, je rentrais et je me connectais à Internet. L'arrivée de ce nouveau moyen de communication, basé sur l'écrit, et non sur des interaction verbales (que je ne maîtrisais pas) m'a aidée à m'épanouir, à me développer, à évoluer. Mais pas toujours en bien.
J'ai pu approfondir ma quête de sexualité, de stimulations intellectuelles et érotiques. J'ai trouvé des forums et des sites où étaient publiés des récits érotiques. Je parlais de sexe sur des forums, avec des gens qui me demandaient mon ASV (Age, Sexe, Ville). Cependant j'étais toujours torturée par mes démons. Je ne connaissais toujours rien aux relations interpersonnelles dans le "monde réel", et qui plus est, j'étais d'une naïveté navrante.

Je me suis mise à correspondre avec diverses personnes, toujours pour parler de sexe, partager des fantasmes. Je ne concevait pas de passer à l'acte, à la rencontre, au réel. J'étais trop peureuse et trop lâche pour ça. Trop anxieuse, aussi.

Parmi mes correspondants, il y avait une soi-disant jeune femme de 19 ou 20 ans, au discours très débridé. Peu à peu, au fil des semaines, des mois, elle avait évoqué des parties fines avec des couples de quinquas, et essayait de toute évidence de m'inciter à participer. Oserais-je prétendre que je n'en ai pas eu le désir, l'envie, la pulsion? Non. En revanche je sais que je n'aurais jamais voulu. J'étais excitée par l'idée.

Ils étaient un certain nombre à m'écrire, à être sans doute fascinés par mon jeune âge. Et ils étaient aussi très certainement nombreux à chercher à abuser de ma crédulité, de ma sincérité.

Un jour mes parents ont tout découvert. Ma mère surtout. J'ai du arrêter toutes mes correspondances du jour au lendemain. Cela m'a valu une certaine rancune de certains. Internet n'était pas ce qu'il est aujourd'hui: c'était avant tout accessible à des personnes qui touchaient leur bille en informatique, en lecture d'IP, voire capables de remonter au numéro RTC de la ligne téléphonique.
J'ai été très blessée que ma mère pense que j'aurai pu me mettre en danger (quoi que j'admette, avec 20 ans de recul, qu'elle avait raison), mais surtout de la violence de l'attitude qu'elle s'est mise à avoir (ne plus respecter mon intimité, chercher à m'imposer des discours sans m'écouter).
J'étais déjà honteuse de mes désirs, de mes fantasmes. Soudain, j'ai eu la confirmation que j'étais monstrueuse.
 
Diverses choses se sont produites. J'ai entamée une relation à distance avec quelqu'un de 20 ans de plus que moi, sans rien connaître de ce qu'était une relation amoureuse "normale" (si tant est que ça existe).
J'ai arrêté, en décembre 1999, le lycée pour essayer de suivre une scolarité via le CNED, ce dont je me suis montrée incapable. J'ai cuisiné, marché, lu et regardé beaucoup de conneries à la TV.
Puis je suis entrée dans un autre lycée, à 150km de chez mes parents.
Peu à peu, j'ai recommencé à traîner chercher une forme de sexualité virtuelle sur Internet et c'est ainsi que j'ai découvert un site publiant des récits érotiques amateurs. J'aimais beaucoup lire et alimenter mon imaginaire. Toutefois seuls 20 récits étaient en accès libre chaque mois : pour pouvoir en lire davantage il fallait prendre un abonnement payant (ce qui était hors de question, pour moi) ou alors devenir contributeur.
Qu'à cela ne tienne, je me suis mise à mon clavier.
J'ai pris plaisir à écrire des textes de quelques pages, mettant en scène une jeune fille de 18ans, les cheveux longs, pas froid aux yeux. Un alias très différent de ce que j'étais dans la réalité.
Puis je me suis enhardie et ai recherché spécifiquement des correspondants. Le site était canadien francophone, aussi la probabilité de correspondre avec des personnes géographiquement proches étaient très réduites.
 
Plusieurs personnes ont répondu à mon annonce. Anicka, Lola et son mari Bernard, Tony, Julien et quelques autres. Tous différents mais tous avec une qualité similaire: une prose agréable à lire et m'engageant aux confidences. Plusieurs de ces correspondants m'ont peu à peu soumis des questionnaires, d'abord légers, puis de plus en plus approfondis.
Honnêtement, je ne me souviens plus de la teneur de ceux-ci. Je n'ai jamais été une acharnée des sauvegardes et tout ça, pour moi, était de l'ordre du fantasme, de l'excitation cérébrale. J'étais très excitée par l'interdit et l'idée de transgression. J'aimais aussi explorer la théorie des possibles.
Toutefois il a toujours existé un très large fossé entre l'esprit et le passage à l'acte.

Je crois me souvenir (et c'est peut être inexact) avoir eut des échanges que je considérais comme hypothétiques sur des relations sexuelles entre mineur et majeur. Sachant que je me projetais dans la position du mineur, toute travaillée par ma sexualité que je l'avais été depuis des années.
Jamais je n'ai envisagé d'acte pédophile et je n'avais absolument pas conscience que, par mes réponses naïves portées par un sentiment d'excitation, je pouvais encourager mon interlocuteur à un comportement réel.

Je n'ai pas le souvenir, entre ma préadolescence et cette période, d'avoir eu des fantasmes mettant clairement en scène une petite fille avec un homme adulte. Aussi je tend à penser que cette idée m'a été suggérée par l'un de mes correspondants, chez qui ce thème spécifique revenait régulièrement.

Idéaliste, j'ai toujours considéré qu'on ne peut pas faire de procès d'intention aux personnes qui ont des fantasmes, même malsains.
Qui plus est, je trouvais mon compte dans les scenarii proposés, puisqu'il s'agissait d'évoquer des "si" me concernant plus jeune. N'ayant pas de machine à remonter le temps je ne voyais pas de mal à tout ça.

Pourtant, aujourd'hui j'ai été qualifiée de "pédophile". Un jugement fondé sur la lecture de ces fameuses correspondances remontant à une vingtaine d'années (qui ont été sauvegardées par quelqu'un de clairement plus obsessionnel que moi).
 
Je ne suis pas attirée par les enfants. Ça serait même plutôt le contraire, puisque je ne suis pas attirée par des hommes moins âgés que moi, ni par des femmes qui ont un "air" ne serait-ce qu'adolescente.
De même, je ne suis pas attirée par les personnes qui ont des désirs pédophiles, que ce soit dans leurs fantasmes ou par des désirs de passage à l'acte.
Je n'ai pas et n'ai jamais eu aucun comportement de cette nature et il ne me viendrait pas à l'idée de toucher ou même de parler à un enfant en des termes sexuels. Cette seule idée me choque profondément.
Autant dire que question activités "pédophiles" de ma part, c'est le grand néant (et un rejet émotionnel profond).

En revanche, oui, j'avoue que j'ai entretenu consciemment, et cependant des années, des fantasmes qui mettaient en scène un avatar de la femme que je suis, sous la forme d'une enfant préadolescente, ayant des rapports sexuels avec des adultes. Je ne saurais prétendre en être fière, pas plus que je n'irais cependant prétendre qu'on m'a amenée à être excitée par cette idée. Ce sont plutôt les émotions érotiques que j'éprouvais étant enfant, qui m'apportaient une forme de plaisir.

Certes, un certain contexte, dont ma relation avec une personne dont ce type de "fantasme" (un homme adulte de toute évidence très excité par l'idée de relations sexuelles avec une jeune fille prépubère) a grandement favorisé la récurrence de ce type de fantasme chez moi, sous diverses formes, et ce pendant des années.
Cependant me concernant, cela n'a jamais dépassé le stade des idées. J'espère ne pas me tromper en écrivant que je n'ai jamais mis par écrit ces fantasmes (je n'en ai en tout cas aucun souvenir) et même si ça avait été le cas, cela n'aurait jamais été dans un objectif de diffusion.
 
J'en ai fini depuis quelques temps déjà avec cet avatar. J'ai fini par réussir à extirper cette idéalisation récurrente qui avait fini par être traumatisante. Ce d'autant que j'ai fini par réaliser qu'il s'agissait d'une forme d'autopunition de n'avoir pas compris que lui, cet homme, n'était pas que dans le fantasme. Pour lui, j'étais un succédané de ce qu'il avait fait par le passé.

Il n'en reste pas moins que je ne suis pas coupable de ses crimes.

Il est hors de question qu'on me punisse à sa place, ou même qu'on me fasse un procès pour des intentions que je n'ai jamais eu.

Mes fantasmes actuels ne regardent que moi et c'est un véritable soulagement de ne plus être harcelée par un compagnon qui cherche à m'en imposer ou m'en soutirer.

J'ai pris du recul sur la sincérité des gens, la crédibilité qu'on peut accorder (ou non) à leurs dires, le degré auquel je suis concernée par leurs convictions ou leurs idéaux. J'ai appris que j'ai le droit d'être en désaccord avec quelqu'un que j'aime, de même que j'ai le droit de refuser ce que je n'approuve pas, ou ce qui ne me fait pas envie à un instant "T". J'ai découvert que j'avais le droit d'être moi-même sans chercher à plaire aux autres à tout prix, et que justement, je ne m'en porte que bien mieux.